The Good Business
Alors que la saison des grands rassemblements dédiés au son et à la hi-fi bat son plein en France, on a eu envie de parler des enjeux du milieu qui n’a jamais autant fait partie de notre quotidien. C’est sur nos smartphones qu’on écoute désormais podcasts et playlists.
Fini les enceintes partenaires du réveil café et des grandes fêtes endiablées ? « Non, bien au contraire ! », répond Stéphane Richard. Ce féru de musique est le Responsable Commercial International de la jeune marque multi-récompensée, Q Acoustics, ainsi que des autres marques du groupe Armourhome Electronics.
On n’a jamais autant écouté de sons en tout genre, musiques, podcasts notamment grâce aux nouvelles technologies. Mais ce combo profusion / disponibilité ne fait-il pas baisser notre exigence sur la qualité du son ?
Non, les audiophiles ont toujours une exigence élevée parce qu’on est dans un univers de passionnés ! Pour les autres, même s’ils n’ont pas les mêmes attentes, ils ont une oreille et peuvent désirer un son, et donc une écoute, de qualité. Donc je dirais qu’au contraire, le consommateur classique devient de plus en plus perfectionniste.
Est-ce que ces nouveaux modes de consommation ont bouleversé votre secteur comme celui du CD par exemple ?
Forcément, il y a un impact. Mais si je prends notre cas, les conséquences sont limitées et surtout plutôt positives pour plusieurs raisons. Déjà, nous travaillons sur des produits qu’on appelle dans notre jargon « haute-fidélité ». L’acronyme hi-fi correspond en fait à son abréviation anglaise, high fidelity, une chaîne hi-fi c’est une chaîne haute-fidélité. Nous fabriquons des enceintes et des systèmes son pour reproduire une musicalité au plus près du signal sonore original.
Ensuite, Q Acoustics est une marque jeune et très dynamique, l’une des plus récompensées en Hi-Fi. Nous avons, par exemple, reçu le prestigieux Diapason d’or pour l’une de nos enceintes l’année dernière.
Très concrètement, quelles technologies utilisez-vous pour améliorer le rendu du son ?
La technologie Gelcore par exemple, que nous avons inventée et brevetée et que nous utilisons pour notre gamme d’enceintes Concept Series. C’est un gel qui permet de lier un caisson dans un autre caisson. Cette technologie efface en particulier la résonance. J’aime citer cette création car elle illustre bien notre credo d’atteindre la meilleure qualité y compris dans le haut de gamme. C’est d’ailleurs pour cette raison que les bouleversements du secteur ne nous forcent pas à revoir systématiquement notre stratégie. Cela étant, nous sommes obligés de tenir compte des mouvements qui traversent le milieu du son, qu’il s’agisse de l’évolution du marché, des produits wireless , wifi ou Bluetooth….
Oui, par exemple vous proposez des produits bluetooth. Ce n’était pas le cas auparavant ?
Nos premiers modèles d’enceintes Bluetooth stéréo il y a cinq ans ont particulièrement bien fonctionné , il y avait une véritable attente des consommateurs. Nous proposons toujours des barres de son Bluetooth, la M2, la M3 et la M4 qui connaissent un succès certain, que ce soit pour écouter de la musique depuis votre smartphone ou pour une utilisation en home cinema.
Justement, le Bluetooth a la cote mais une des critiques est de dire que la qualité n’est pas au niveau du filaire. Est-ce encore vrai en 2018 ?
Quand on écoute de la musique en Bluetooth, la qualité du son ne sera jamais aussi bonne qu’en filaire, c’est une évidence. Il est vrai qu’on est en train d’améliorer les choses, avec des codecs plus performants mais de là à dire qu’il y aura un jour une vraie égalité, j’ai du mal à y croire !
En fait, tout dépend de votre utilisation. Pour écouter des playlists en streaming, c’est très bien, idem si vous voulez équiper plusieurs pièces de votre maison, ce qu’on appelle le multi-room. Nous proposons cette solution à travers notre marque Systemline : les amplis sont reliés aux enceintes en filaire mais vous pouvez aussi écouter votre musique ou vos radios préférées en Bluetooth. Chaque utilisateur, de l’audiophile passionné à l’auditeur occasionnel, a des exigences différentes mais aura envie au final d’un son de bonne qualité.
Mais alors, pourquoi le filaire donne-t-il une meilleure qualité de son ?
Il faut savoir que la qualité du son est le résultat d’un ensemble de facteurs : la qualité de l’amplificateur, des enceintes et celle de la source diffusant l’enregistrement mais il y a une chose que les gens ont tendance à oublier, c’est la qualité des accessoires. Vous pouvez avoir le meilleur ampli et la meilleure enceinte du monde, si vous utilisez des accessoires,comme un câble audio ou un câble d’enceinte, de qualité médiocre, vous perdez tout le bénéfice de votre système.
Notre groupe, propriétaire et fabricant de la marque Q Acoustics, est aussi propriétaire de la marque QED, spécialisée dans les accessoires, dont les câbles. Les revendeurs la conseillent : tout audiophile la connaît et sait que c’est une marque de haute qualité.
Alors, pour vous le son idéal c’est la rencontre entre un bon ampli, des enceintes filaires et un bon câble ?
Il n’y a pas de système idéal, il y a des systèmes pour chacun et chaque cas. Par exemple, si je veux écouter un album des Rolling Stones, ce sera si possible via un disque vinyle. Pour de l’électro, une playlist en streaming, c’est très bien. Avant c’était tout vinyle, puis tout CD, aujourd’hui nous disposons d’un large choix de support selon nos sensibilités et nos usages.
Vous citez le vinyle, qui connaît une nette hausse des ventes depuis environ cinq années. Qu’est-ce que ce son a de particulier ?
Attention, le vinyle n’a jamais disparu alors que le CD, lui, va disparaître. Il est vrai que sa croissance ces dernières années est considérable. Et je suis bien placé pour en parler puisque notre groupe est aussi propriétaire de la marque Goldring qui fabrique des cellules, la partie qui se trouve au bout du bras de lecture en contact avec le disque vinyle. Goldring existe depuis 1906, elle a une grande réputation dans le milieu. Depuis ces cinq dernières années, nous enregistrons une croissance des ventes à deux chiffres. C’est bien un indice qui prouve que les gens ont l’envie d’une belle qualité sonore car pour les amateurs c’est une qualité d’écoute incroyable et une approche différente de la musique, une forme de retour à ce qui est authentique.
Quand le CD est sorti tout le monde disait : « c’est génial ! », il offrait un son nouveau. Le problème est que s’il gommait des défauts il gommait aussi certaines qualités de l’enregistrement. Les imperfections perceptibles faisaient partie du charme, si je puis dire. Prenez le réglage d’un concert, il y a des sons qu’on n’entend pas sur la version CD mais que l’on distingue très bien sur un vinyle. Et puis son succès vient aussi de sa belle pochette, du plaisir de l’objet, sans oublier le côté vintage.
En parlant des succès à venir, petit pari. Dans les dix prochaines années, quels seront les hits du secteur ?
C’est très difficile comme question, vous me demandez d’être visionnaire (rires) ! Dans cette industrie on a déjà du mal à se projeter à deux ans mais je peux vous donner des tendances, en fonction de mes observations actuelles.
Je suis convaincu que les systèmes wireless vont continuer à se développer mais qu’en parallèle il y aura toujours une clientèle pour le filaire. La simplicité de l’installation sera sans doute un critère de plus en plus important, tout comme le fait de pouvoir écouter sa musique partout. La miniaturisation continuera sans doute de se développer, comme c’est le cas pour le smartphone. Je pense aussi au multi-room en wireless qui est devenu en peu de temps un produit grand public alors qu’il n’y a pas si longtemps seuls les professionnels l’installaient.
Mais les technologies évoluent tellement vite, c’est compliqué de prédire les succès futurs. Surtout dans ce domaine, où l’on n’est pas uniquement dans l’univers de la hi-fi mais plus généralement dans celui du son et du Lifestyle. La question centrale restera : quelle est la meilleure façon d’écouter de la musique, chez soi ou ailleurs, en se faisant plaisir ?
Vous avez choisi de baigner quotidiennement dans ce domaine. Est-ce que ça change votre rapport personnel au son ?
J’ai un principe : lorsqu’on travaille dans le son, on doit aimer ça. Vous ne pouvez pas vendre du son comme vous vendez autre chose. Le travail est constant mais c’est avant tout un travail plaisir. On fait plaisir aux gens et on se fait plaisir en leur faisant plaisir. Quand mon emploi du temps me le permet, je me rends à des concerts et ce depuis toujours, bien avant d’entrer il y a sept ans chez Armourhome – le groupe à qui appartiennent les marques Q Acoustics, Qed et Goldring.
Vous avez toujours eu un matériel au top ?
J’ai toujours essayé ! Même ma première paire d’enceintes et mon premier ampli. C’était en 1988, je m’en rappelle toujours, la banque aussi… J’ai dépensé une fortune, presque un mois de salaire, pour les acheter. Le revendeur qui m’a conseillé a dit : « Vous ne le regretterez pas ! », suivi de : « Surtout achetez aussi un bon câble ». C’est lui le premier à m’avoir expliqué qu’on ne pouvait pas obtenir un son de qualité sans câble à la hauteur des enceintes. Le système m’a coûté un bras mais il a duré pendant des années. D’ailleurs, il fonctionne toujours.
Pour finir, j’aimerais vous demander comment le secteur hi-fi, et vous en particulier, s’engagent pour l’environnement. C’est devenu un critère dans le choix des clients…
La réponse est très claire. Sur la fabrication des enceintes et des câbles, nous utilisions des métaux traditionnels, en particulier le cuivre pour le câble. Par ailleurs, nous sommes très vigilants quant à la composition des laques utilisées pour la finition des enceintes. Nous sommes sur des matériaux de moins en moins polluants, contrairement aux smartphones qui utilisent des matériaux plus dommageables. Nous prêtons une attention particulière à ce que nos partenaires industriels emploient les composants les plus respectueux de l’environnement possible. C’est fondamental pour la planète ! Quel que soit le produit, nous en tenons compte, et nous ne sommes pas les seuls, fort heureusement ! D’une façon générale, l’environnement ne doit pas être un argument marketing ou une contrainte mais une prise de conscience pour agir avant d’arriver à une catastrophe.