The Good Business
Dans les plus grandes foires internationales, les prix des œuvres peuvent atteindre la stratosphère, faisant du marché de l’art une bulle où le business prime parfois sur le fond. Toutefois, certains prennent un curieux contre-pied en s’inscrivant dans une nouvelle dynamique, celle de l’économie participative. Phénomène.
L’œuvre d’art est plus accessible
A Bruxelles, depuis douze ans, une autre manifestation baptisée Art Truc Troc & Design rameute chaque année des milliers de personnes en février, dans le palais des Beaux-Arts – Bozar. Plus de 300 œuvres d’une centaine d’artistes, la plupart émergents, sont présentées. On trouve aux cimaises à boire et à manger, mais si l’événement plaît autant – 20 000 visiteurs en 2016 –, c’est qu’il inclut une dimension spectaculaire liée au fait que toutes les propositions de troc sont rendues publiques.
Les vedettes d’Art Truc Troc, ce sont donc autant les œuvres que les Post‑it collés autour, où sont exprimées les offres des éventuels acquéreurs : cours de salsa ou de golf, places de concert, repas dans un restaurant étoilé… La surenchère est aux murs, mais elle est bon enfant.
Echangeable contre des services ou des objets, l’œuvre d’art perd en aura, mais elle gagne en accessibilité.
Mieux encore, à travers le système du troc, l’acquéreur peut même avoir le privilège d’être partie prenante de la création.
C’est dans cet état d’esprit, en tous les cas, que l’artiste David Guez et la commissaire d’exposition Anne Roquigny ont créé leur plate-forme en ligne Hostanartist, qui met en relation des créateurs avec des particuliers désireux de les héberger chez eux, contre une œuvre d’art, un texte original, un cours particulier ou encore un concert privé. « Il existe très peu de résidences disponibles pour les artistes en France, et les échanges entre artistes et amateurs d’art restent la plupart du temps restreints aux vernissages. Ces offres de résidence profitent aux artistes, qui accèdent à de nouveaux lieux pour réfléchir et travailler, mais aussi aux hôtes, qui sont ainsi au plus près du processus de création », expliquent-ils.
Hostanartist, qui fonctionne sur le modèle associatif, (il n’y a pas de système de commission), a d’ailleurs reçu un soutien du ministère de la Culture et de la région Ile-de-France. On peut reprocher à tous ces projets de court-circuiter les intermédiaires que sont les galeries, mais on peut aussi les créditer d’une belle capacité à créer des circuits plus conviviaux et moins codifiés. La multiplication de ces formes d’échanges atteste d’un nouveau rapport au monde de l’art découplé de la cote et de la spéculation. Qui aurait cru qu’un jour le monde de l’art s’inscrirait, lui aussi, dans la dynamique de l’économie de partage ?