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Transports, la révolution Skytran
La cité du futur : des cabines transportant les passagers et suspendues à des rails élevés à hauteur d’immeuble.
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The Good Business

La Révolution Skytran – Transports

The Good Business

Cette société californienne a pour objectif de changer du tout au tout nos moyens de transport individuels, en proposant une alternative rapide, écologique et personnalisée. Sa force : son coût et sa relative facilité de mise en œuvre. Les tout premiers tests auront lieu dans les prochains mois, à Tel-Aviv.

Fermez les yeux. Imaginez la cité du futur, dans laquelle les routes sont fluides et les déplacements, rapides. Imaginez une capsule confortable, silencieuse, et écologiquement propre, qui vous transporterait dans les airs, à hauteur d’immeubles. Ce rêve, Skytran promet de le réaliser bientôt. Nous ne sommes pas loin des films de science-fiction ou des illustrations des années 50 se projetant en l’an 2000. Cette start-up californienne ne propose pas seulement un nouveau mode de transport, elle envisage carrément un nouvel urbanisme et propose une technologie qui, à terme, pourrait s’appliquer à de nombreux autres domaines. Bref, si ça marche, c’est une révolution. Et cette révolution serait en marche ! Mais avant d’aller trop vite en besogne, rendez-vous est pris dans un hangar du NASA Ames Research Center, à Mountain View, en Californie. Situé en pleine Silicon Valley, il a pour voisins Google, le centre médical de Stanford ou Yahoo!, et rassemble, sur un vaste terrain, une trentaine de jeunes pousses, une douzaine d’universités et environ 80 partenaires. Toutes ces entités ont deux points communs : la technologie et un contrat de développement avec la NASA, pour une durée plus ou moins longue. C’est d’ailleurs ici, il y a une dizaine d’années, qu’une certaine entreprise dénommée Tesla – les ­voitures électriques – a débuté (lire The Good Life no 20, p. 126).
Quand on entre chez Skytran, rien de spectaculaire au premier abord. Ici, ni table de ping-pong, ni jeunes hipsters barbus en short. Seulement un hangar tout en longueur, deux étranges structures métalliques horizontales, un écran, un tableau, quelques chaises autour d’une table et une moquette hors d’âge. D’évidence, l’apparence n’est pas la priorité ni du président, Jerry Sanders, ni de ses équipes. Dans un coin se trouve une sorte de capsule spatiale aux formes arrondies ; un peu comme une cabine de téléphérique dans une station de sports d’hiver. Mais en plus esthétique. Cette maquette grandeur nature, qui peut accueillir deux personnes, est la plus belle carte de visite de Skytran. Elle est surtout la seule à être visible pour le moment.

Aérodynamique, confortable, écologique et silencieuse, la capsule est commandée par l’utilisateur via une application et peut transporter jusqu’à quatre personnes. Sa vitesse de pointe est de 200 km/h.
Aérodynamique, confortable, écologique et silencieuse, la capsule est commandée par l’utilisateur via une application et peut transporter jusqu’à quatre personnes. Sa vitesse de pointe est de 200 km/h. DR

Lévitation magnétique

L’idée est de créer un réseau de rails en ­hauteur, à l’échelle d’un quartier, d’un aéroport, d’une ville, voire d’un pays. Ces rails, reliés par des pylônes, permettent à des navettes transportant deux à quatre personnes, de se déplacer d’un point A à un point B. La navette, commandée par l’utilisateur via une application, se prend à la gare la plus proche, et se déplace à une vitesse qui varie de 100 à 200 km/h. Les gares peuvent se situer au niveau du sol, en hauteur ou en sous-sol. Peu importe. Pourquoi ce système prendrait-il le pas sur tous les autres ? La réponse est double : d’abord, parce que la technologie existe déjà ; ensuite, parce qu’il ne coûte pas cher. Un seul mot peut résumer la force du projet Skytran : l’aluminium. Ainsi, les rails et les cabines seront composés de ce métal, léger et peu coûteux. Seuls les pylônes portant les rails (eux-mêmes entourés de tubes) seront en acier solide. La légèreté et la conductivité de l’aluminium permettront aux cabines de se déplacer très rapidement, avec très peu d’énergie puisque le moteur pourra fonctionner avec une énergie équivalente à celle de deux… sèche-cheveux ! L’idéal étant que cette énergie provienne de l’éolien ou du solaire. On peut imaginer, par exemple, que des panneaux solaires soient placés sur les tubes entourant les rails.
Mais alors, comment propulser ces cabines à grande vitesse avec si peu de puissance ? Grâce à la technologie maglev (pour magnetic levitation), c’est-à-dire à lévitation magnétique. Découverte dans les années 60, elle n’a pourtant rien de nouveau. Mais la maglev façon Skytran, dite SMLV, inclut l’aluminium. Et c’est en ça que l’invention des ingénieurs de Skytran est révolutionnaire : rendre l’aluminium magnétique. En fait, si un objet lancé sur une plaque d’aluminium prend une direction oblique, le frottement le rend magnétique. Un aimant sur de l’aluminium : il suffisait d’y penser… Et de réussir !
A Mountain View, la démonstration est faite sur le prototype, à échelle 1/4. Un rail d’une vingtaine de mètres est installé. Le « robot », qui est en fait le support à roues soutenant la cabine, avance et se lève. Ses patins prennent un mouvement oblique, qui permet le magnétisme naturel – sans électroaimant. La conductivité de l’aluminium fait le reste. « Cette idée a été conçue il y a près de vingt ans par Doug Malewicki, un ingénieur de Stanford qui a travaillé sur les missions Apollo. Cela a pris deux décennies pour la rendre concrète », explique Jerry Sanders. Quatre autres ingénieurs, tous basés sur la côte Ouest, de Seattle à Los Angeles en passant par Santa Cruz, ont apporté de l’eau au moulin : Lee Wamble, John Cole, Clark Foster et Robert Baertsch Le budget et l’origine des fonds de Skytran sont « privés », avance Jerry Sanders, qui, visiblement, ne souhaite pas en dire plus et aime à cultiver une part de mystère quant à ses sources de financement. On sait simplement que, jusqu’à présent, la principale dépense a été la rémunération des chercheurs. On sait aussi que l’arrivée d’Eric Schmidt comme investisseur, cette année, a changé la donne. L’ancien président de Google a fait un chèque de 2,5 millions de dollars. C’est en tout cas ce qui a été révélé au public. Une somme peu importante, voire dérisoire, dans le contexte actuel de la Silicon Valley, mais qui a pu attirer d’autres investisseurs…

Combien ça coûte ?

Skytran affirme que 9 millions de dollars sont nécessaires pour la construction de 1 mile (soit 1,6 km). Ce qui n’est pas cher si l’on compare à 1 mile d’autoroute (40 millions de dollars), à 1 mile de voie de chemin de  fer (100 millions) et à 1 mile de ligne à grande vitesse, comme celle qui est en cours de construction en Californie (1 milliard). Surtout, l’installation ne nécessitera pas l’achat de terrains : il suffira de monter les pylônes en hauteur et de négocier avec les collectivités locales. Quant au public, il ne devra pas débourser grand-chose. Selon Jerry Sanders, il devrait lui en coûter « environ l’équivalent d’un ticket de bus ou de métro ». Tout en précisant que « cette variable dépendra de beaucoup de choses ».
D’ici à 2017, trois tests grandeur nature auront lieu en Israël, à Tel-Aviv. Skytran a conclu un partenariat – dont on ne saura rien quant à la teneur exacte – avec Israel Aerospace Industries, qui construit les « magplanes », comme les appelle Jerry Sanders : des petites cabines à l’aérodynamisme dernier cri. A la fin de cette année, une première navette sera testée sur 200 mètres et une seconde, courant 2016. En fin d’année prochaine ou début 2017, un test de 1 km sera effectué sur une boucle entière, avec virages. Plusieurs clients croient déjà à ce système. « En France, nous sommes en négociations avancées avec l’aéroport Charles-de-Gaulle, à Paris, et avec le Parc Astérix. A l’étranger, je peux citer les municipalités de Baltimore, aux Etats-Unis, de Tel-Aviv, d’Herzliya et de Netanya, en Israël », confirme Jerry Sanders. L’an 2000, on vous l’a dit, c’est pour demain. Il était temps…

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