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Maboneng, Johannesburg.
Maboneng, unquartier populaire et industriel devenu en quelques années le spot le plus tendance de la ville.
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The Good Business

Johannesburg, le Brooklyn d’Afrique du Sud ?

The Good Business

Un renouveau immobilier donne une deuxième vie aux entrepôts industriels abandonnés et favorise la créativité d’une nouvelle génération qui regorge d’énergie. Galeries d’art, tables branchées et rooftops à gogo… The Good Life s’est promené sur les trottoirs de la capitale économique d’Afrique du Sud.

290 jours de soleil par an, 1 600 mètres d’altitude étalés sur 2 600 km2 pour une métropole âgée de 131 ans qui abrite plus de 7 millions d’habitants et produit presque 40 % du PIB du pays. Des chiffres qui font tourner la tête ? Pas autant que ça, car Johannesburg est devenue un hub de référence pour l’Afrique entière. Une belle ligne d’arrivée pour celle qui est considérée comme la capitale économique d’un pays de 57 millions d’habitants, qui a vécu 43 ans de violence et ségrégation (l’apartheid s’est achevé en 1991). Depuis, les choses ont changé graduellement et Johannesburg se réinvente en misant sur un développement immobilier conscient et coloré, sur la créativité et sur le tourisme, qui s’ouvre désormais aux Occidentaux. Mais, quels sont les quartiers phares de cette révolution ? The Good Life a fait le tour.

Les toits de Johannesburg, vue du rooftop de la galerie Agog.
Les toits de Johannesburg, vue du rooftop de la galerie Agog. Giovanna Castelli

Le lieu de lumière

Des buildings, autrefois squattés par les gangs, ont été récupérés et rénovés pour la joie des street artistes. Il y a encore dix ans, personne ne se serait aventuré à Maboneng, dans le quartier de Jeppestown. En dépit de la criminalité galopante, Jonathan Liebmann, à la tête de Propertuity Development, s’est intéressé aux entrepôts industriels délaissés. « Les nouvelles idées, l’innovation et la disruption me fascinent », c’est en mettant en pratique ces préceptes qu’il commençait à instaurer, voilà dix ans, des partenariats entre la ville et des organismes privés qui favorisent les investissements dans cette zone de développement urbaine, désormais attractive aux yeux des jeunes entrepreneurs. « Notre communauté a joué un rôle catalyseur dans le changement de Joburg. Je l’ai fait en m’entourant de personnes passionnées à l’esprit ouvert. Beaucoup de nos locataires et propriétaires dans le quartier étaient des co-pionniers et partageaient avec moi cette vision d’une ville adaptée à la marche. Il y a encore un long chemin à faire, car nous avons remis de l’ordre que dans une petite partie de la ville. » précise le quarantenaire charismatique qui achetait son premier appartement à 18 ans à peine.

Maboneng, un quartier populaire et industriel devenu en quelques années un spot tendance de la ville.
Maboneng, un quartier populaire et industriel devenu en quelques années un spot tendance de la ville. DR

C’est grâce à lui aussi si aujourd’hui à Maboneng, « lieu de lumière » en Sesotho, on respire une atmosphère brooklinienne qui regorge d’énergie, de graffitis et d’activités en plein développement. Il suffit de penser à la galerie Agog (et son joli rooftop bar), dont le nom est un renvoi à un état d’excitation et d’anticipation, mais aussi au Moad Museum of African Design, en construction, ou The Cosmopolitan Tectonic, un bâtiment classé de la fin du XIXe siècle qui deviendra un concept store haut-de-gamme du type Dover Street Market ou Opening Ceremony. 

A Johannesburg, l’art est omniprésent dans les rues.
A Johannesburg, l’art est omniprésent dans les rues. Giovanna Castelli

The Purple Shall Govern”

Depuis le rooftop du Neighbourgoods Market, on est salué par un immense Mandela en noir, violet et orange au poing levé : “The Purple Shall Govern.” Les murs du quartier étudiant de Braamfontein sont aussi remplis de graffitis. Lunettes rondes qui cachent le regard, des salopettes en jean ou des robes en shweshwe, tissu traditionnel sud-africain multicolore : les jeunes branchés de Johannesburg se retrouvent dans ce marché du samedi matin, célèbre pour ses produits alimentaires bio de toute sorte, à déguster au rythme d’un dj set éléctro. Le reste de la semaine, ils se donnent tous rendez-vous au Kitchener’s, un vieux hôtel colonial converti en pub.

Le quartier de Braamfontein.
Le quartier de Braamfontein. Giovanna Castelli

Une jeunesse locale qui aime bien faire la fête aussi à Melville, un district à l’ambiance décontractée. Dans les rues caractéristiques, à l’ombre de jacarandas, on entend des notes jazzy échappées d’un café lors d’un concert live. Mais avant d’y débarquer, une séance shopping au Precincts 44 Stanley à Sunnyside sera parfois obligée. A Johannesbourg, tout se renouvelle : cette ancienne fabrique, où on reparait bus et trams, est devenue un hub tendance avec beer gardens, restaurants et boutiques à la mode (dont Odrin est la favorie de TGL).  

Le square en face du 27 Boxes Shopping Centre, à Melville.
Le square en face du 27 Boxes Shopping Centre, à Melville. Giovanna Castelli

Johannesburg, de l’art dans tous les sens

Maboneng n’est pas la seule destination arty de la métropole. Les galeries les plus prestigieuses se déroulent tout au long de la 7th Avenue, dans le quartier nord de Rosebank. « La scène artistique de Johannesburg est très dynamique. De nombreux espaces et hubs culturels voient le jour, la création d’art bouillonne ! » Blake, originaire de l’Ohio qui a posé ses valises à Johannesburg depuis 5 ans, n’a pas tort. Il travaille pour la Momo Gallery qui ouvrait ici en 2003, et fort de son succès inaugurait une filiale au Cap en 2015. Depuis septembre 2016, il y a aussi le Mesh Club, sorte de coworking de luxe qui connecte les entrepreneurs locaux et facilite les rencontres entre eux. Comment ? On y accède par une souscription annuelle de 32 500 rands par an (soit environ 2 000 euros). La gastronomie surfe également sur cette heureuse vague du business, et à Rosebank c’est David Higgs, un des chefs stars en Afrique du Sud, qui a ouvert son premier restaurant juste en face des galeries Circa et Everard Read.

Une exposition de l’artiste Sud-Africain Nigel Mullins, Circa Gallery.
Une exposition de l’artiste Sud-Africain Nigel Mullins, Circa Gallery. Giovanna Castelli

Pour d’autres, Johannesburg est un rappel immédiat à Soweto. Encore moins trendy et gentrifiée par rapport à Maboneng ou Rosebank, la township phare des émeutes contre la libération de l’apartheid dans les années 1990 s’ouvre également aux touristes avec des tours organisés en vélo, des Airbnb et des auberges de jeunesse. Cette cité de plus d’un million d’habitants peut réserver quelques surprises surtout le week-end : une balade dans la rue Villakatz, à Orlando West, célèbre pour le shopping et une visits au musée Hector Pieterson et à la Maison Mandela, voisine, laissera la scène à un défilé des bolides presque surréaliste. « Certains habitants de Soweto, qui parfois ne possèdent même pas un réfrigérateur, sortent leurs BMW et Porsche pour un tour du quartier avant de se poser dans un shebeen (ancien bar clandestin, lieux de rendez-vous pendant l’apartheid NDLR). Il y a un monstrueux culte de la voiture et du shopping dans les centres commerciaux ici. » affirme Sam, un Français qui a fait de l’arrivée des touristes Occidentaux une profession. « Les locaux maîtrisent les Smartphones et les app avec lesquels ils achètent l’électricité au forfait et payent leurs courses, mais souvent ne savent pas se servir d’un ordinateur », conclu-t-il. Un bizarre de paradoxe ? Parallèlement, entre une table branchée à Melville, une galerie d’art à Rosebank, un marché bio à Braamfontein et un soundowner sur un rooftop à Maboneng, Johannesburg continue à jouer le Brooklyn à la sauce sud-africaine…

Jeunesse branchée en terrasse.
Jeunesse branchée en terrasse. DR

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