The Good Business
Créateur du fameux Le Lion bar à Hambourg, la réputation de Joerg Meyer n’est plus à faire. Le mixologue allemand s’est penché pour nous sur les nouvelles tendances de la scène cocktail à l'occasion de l'inauguration du Sape Bar, le nouveau bar de l'hôtel 25hours Terminus Nord, à Paris.
Si le monde de la restauration enchaîne les tendances ostentatoires (décorations signées d’architectes d’intérieur en vogue, assiettes à partager, cuisine fusion, burgers sous toutes les formes), celui des bars semble plus discret. Certes, on aura bien remarqué la flopée de « speakeasy » débarqués il a deux ou trois ans à Paris et goûté au renouveau de l’art du cocktail, mené entre autres par l’Experimental Cocktail Club, mais aucun indice ne pointait vers une destination claire pour le futur de la scène cocktail en 2019. C’était sans parier sur l’expertise du mixologue star Joerg Meyer, de passage à Paris à l’occasion de l’inauguration du Sape Bar, sa nouvelle création pour les hôtels 25hours.
Le Sape Bar n’est pas un simple bar d’hôtel qui proposerait à ses clients des cocktails dans une ambiance feutrée. S’il remplit avec brio ces missions, le bar de l’hôtel 25hours Terminus Nord a su s’adapter aux nouvelles façons de consommer l’alcool. Aux commandes de cette réflexion, Joerg Meyer, qui oeuvre derrière les bars depuis l’âge de 17 ans.
The Good Life : Vous collaborez avec les 25hours hotels depuis des années. Vous avez créé pour eux les bars de leurs établissements, notamment en Allemagne, à Hambourg et Munich. En quoi imaginer un nouveau concept pour Paris fut-il différent de vos expériences passées ?
Joerg Meyer : Ce n’est un secret pour personne, le public parisien est particulièrement exigeant ! Le client est toujours la première variable que j’étudie quand je me lance sur un projet. En dehors de son origine démographique, c’est également intéressant de se demander quel est son profil. Qui il est, pourquoi il se rendra dans ce bar plutôt qu’un autre… Avec les bars des 25hours hotels, je sais que dois contenter en priorité une clientèle pointilleuse qui a l’habitude de fréquenter des beaux hôtels, et qui veut passer un moment tranquille à son bar et qui n’y restera peut-être pas toute la soirée. La réelle différence avec Hambourg ou Munich se situe au niveau de l’histoire que nous racontons à travers le Sape Bar. Chaque hôtel du groupe a sa propre identité. Il a donc fallu en faire découler la personnalité du bar, et de sa carte.
The Good Life : Qui est donc le Sape Bar ?
J. M. : Il y a deux ans et demi, quand nous travaillons sur le concept de l’hôtel, l’idée du Sape Bar nous est rapidement apparue. Largement inspiré par les origines indiennes ou africaines de ses habitants, le 25hours hotel Terminus Nord rend hommage à la multiculture de son quartier, le 10ème arrondissement de Paris. Il a été décidé que son bar se concentrerait sur un mouvement africain en particulier, celui des Sapeurs congolais. L’histoire de ces gentlemen néo-dandies incroyablement chics m’a inspirée. Ils sont à la fois des personnes qui assument entièrement leur style, qui projettent une aura de joie tout autour d’eux, admirés dans le monde entier. Nous avons imaginé notre carte de cocktails sous le prisme de quatre adjectifs qui les qualifient à nos yeux : élégants, courageux, colorés et cool. Ainsi, j’ai mixé pour les « élégants » des alcools nobles comme le vermouth ou le Scotch, pour les « courageux » des alcools que l’on retrouve rarement dans des cocktails (le grappa, la genièvre), j’ai conçu pour les « colorés » des cocktails pleins de couleurs, à l’image des costumes des Sapeurs, et, enfin, pour les « cools », nous avons décidé d’emprunter les recettes des cocktails des bars les plus branchés de Paris, comme le « Naked & Famous » du Candelaria.
TGL : Comment boit-on le cocktail en 2019 ?
J. M. : Il est vrai qu’on voit quelques bars se mettre au pairing cocktail-tapas, notamment à Hambourg où la clientèle adore picorer tout en dégustant son drink. Je vois aussi fleurir des recettes de cocktails salés, souvent à base de mezcal ou de tequila qui se marient bien avec le sel, des saveurs de caramel salé, aussi. Mais ce que j’essaie de développer ici au Sape Bar, tourne autour du mieux consommer. Je rapproche mon monde des cocktails et la scène food, car à Paris l’importance des cultures locales et bios est grandissante. C’est fascinant de rencontrer des petits artisans passionnés par leur métier et collaborer avec eux. Nous avons réussi à trouver des partenaires de choix, comme le Gin NAUD, qui vient de Cognac, et la « Folle Envie », un apéritif corse au citron jaune et à la cardamome. On propose cet alcool neat, ou simplement agrémenté d’un peu de tonic. Parfait pour notre clientèle est particulièrement friande de cocktails low en alcool.
TGL : Les cocktails sans alcool seraient-ils en passe de devenir tendance ?
J. M. : Je ne dirais pas ça. Je ne comprends pas cet engouement autour des « alcools sans alcool », des gins qui ne sont même pas distillés – puisqu’ils ne contiennent pas d’alcool ! – et qui, par conséquent, ne devraient pas s’appeler « gin » ! Mais avec un joli packaging et une stratégie marketing bien ficelée, des marques arrivent à percer… De mon côté, je préfère trouver des bonnes idées pour les clients du Sape Bar qui doivent se lever tôt le lendemain, pour attraper leurs trains en Gare du Nord, ou qui doivent conduire une négociation tout en gardant les idées claires. Nous proposons une sélection de « easy » cocktails, garantis légers et savoureux !
Sape Bar, à l’hôtel 25hours
12 Boulevard de Denain, Paris 10e
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