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Le père Paolo Benanti est l’expert du Vatican en matière de technologie et d’éthique. Il revient sur le projet de « jumeau numérique » de la basilique Saint-Pierre.
Le père Paolo Benanti est l’expert du Vatican en matière de technologie et d’éthique. Il revient sur le projet de « jumeau numérique » de la basilique Saint-Pierre.
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Rencontre avec le père Paolo Benanti, expert du Vatican en matière de technologie et d’éthique
The Good Life : Vous êtes le conseiller du pape François sur les questions d’éthique et d’intelligence artificielle. Contre quels dangers souhaitez-vous mettre en garde le Vatican ?
Paolo Benanti : Nous sommes une espèce étrange. La première fois qu’un individu a pris un bâton dans ses mains, était ce un outil ou une arme ? Le potentiel de l’IA nous met face à la même question. Le rôle de l’éthique est de s’assurer que nous concentrons nos efforts vers la première option.

En 2020, le Vatican a lancé un débat avec les géants de la tech sur ce sujet. Microso et IBM ont signé l’Appel de Rome pour une éthique de l’IA . Comment expliquez-vous qu’une entité religieuse ait mené ces discussions plutôt que les Nations unies ?
Paolo Benanti : Le projet est parti du Vatican mais il s’agit avant tout d’éthique, et non de religion. C’est un concept né avant le christianisme, avec les philosophes grecs. Le pape François veut porter un message de paix entre les communautés, quelles qu’elles soient. Proposer des limites pour l’IA va dans ce sens. Je suis aussi l’un des 38 membres du High Level Advisory Body on Artificial Intelligence, un comité de l’ONU qui recommande des actions pour la gouvernance de l’IA au niveau international.
En quoi consiste le « jumeau numérique » de la basilique Saint-Pierre de Rome, lancé fin 2024 ?
Paolo Benanti : C’est une modélisation 3D du monument, effectuée grâce à 450 000 images collectées par la société Iconem et traitées par une IA mise au point par Microsoft. Le site donne accès à des détails jusqu’alors inaccessibles, comme le dos de la Pietà de Michel-Ange, ou les angelots au sommet du baldaquin du Bernin. On a même retrouvé des graffitis qui ont été laissés par les artisans de l’époque !

Quel est le degré de précision de la reconstitution ?
Paolo Benanti : L’IA a détecté des failles dans la structure, ainsi que des mosaïques manquantes. C’est une immense découverte qui permet de remédier aux problèmes de manière ciblée et efficace.
Le double numérique constituerait donc une sorte d’assurance ?
Paolo Benanti : Saint-Pierre a été édifiée avec les technologies de pointe de son époque, comme le béton de tuf. Nous avons perdu une partie de ce savoir-faire. La transmission des connaissances d’une génération à l’autre n’est pas une évidence. Imaginez le gain de temps et de ressources si Notre-Dame avait eu une copie numérique sur laquelle s’appuyer pour la reconstruction.

Vous n’avez pas peur que cette basilique numérique dénature notre rapport au site historique ?
Paolo Benanti : Cette version peut aider à décrypter l’expérience physique du monument. C’est un outil fabuleux pour donner des clés de compréhension aux visiteurs et rendre un lieu iconique intelligible pour le plus grand nombre.
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