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The Good Business

Gore-Tex, l’innovation au sommet

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Grâce à sa fantastique membrane isolante mise au point il y a cinquante ans, la firme américaine Gore-Tex séduit autant les marques de vêtements techniques que les directeurs artistiques de maisons de couture. Avec une base-line attractive : « Améliorons la vie ensemble ».

C’est la marque « ingrédient » la plus populaire du monde. Pour les pratiquants de nombreuses disciplines sportives, elle est synonyme de grands espaces, de liberté, de conditions extrêmes et de dépassement de soi. Chez les simples amateurs de loisirs outdoor et les frileux de tout poil, son nom résonne comme la promesse du confort qui permet de jouir de l’immersion dans la nature sans pâtir de l’âpreté des conditions climatiques. Le nirvana, en somme ! En quelques décennies, le célèbre logo noir en forme de diamant de Gore-Tex et sa légendaire « garantie de vous maintenir au sec » (« Guaranteed to keep you dry ») se sont imposés dans les rayons textiles.

Ils apparaissent sur les étiquettes de vêtements et d’équipements des labels de sportwear de référence tels que Patagonia, The North Face ou Salomon. Et même des griffes grand public comme Adidas, Converse et New Balance, ainsi que des maisons de luxe en vogue – à l’image de Prada, Supreme et Off-White – s’offrent des collaborations avec l’entreprise en intégrant sa fameuse membrane imperméable dans leurs produits.

Les spécificités qui font la renommée des produits Gore-Tex sont testées en laboratoire, comme la résistance au vent, la flexibilité, l’imperméabilité ou encore les propriétés tactiles des gants.
Les spécificités qui font la renommée des produits Gore-Tex sont testées en laboratoire, comme la résistance au vent, la flexibilité, l’imperméabilité ou encore les propriétés tactiles des gants. DR

Gore-Tex et sa membrane à usages multiples

Etant donné sa renommée internationale, la firme américaine aurait pu installer son siège dans un building pompeux d’une mégapole. Il n’en est rien. Les équipes de Gore (maison mère dont Gore-Tex est l’une des trois divisions) sont réparties dans seize bâtiments de taille moyenne, éparpillés entre les Etats du New Jersey, du Delaware et du Maryland. A Newark, dans le centre de R&D ouvert il y a quatre ans, les responsables ne perdent pas une occasion de revenir sur les origines de l’entreprise.

Il faut dire que son histoire a tout de la parfaite success-story made in the USA. Elle commence le 1er janvier 1958, à quelques rues de là, dans le sous-sol du pavillon de Bill et Vieve Gore. Le couple fête en même temps le jour de l’an, son 23e anniversaire de mariage et ses débuts dans l’entrepreneuriat. Bill vient alors de quitter son poste d’ingénieur chimiste chez DuPont pour se lancer dans le commerce des polymères fluorocarbonés. Onze ans plus tard, leur fils Bob, qui travaille avec eux, fait une découverte décisive : la transformation du fluoropolymère (PTFE) en PTFE polyvalent (ou ePTFE).

Les tests réalisés en laboratoire sont complétés par des expérimentations menées sur le terrain par des groupes de sportifs ou des guides de montagne dans les conditions réelles, comme ici pour les vestes Vassi GTX Pro de l’équipementier suédois Haglöfs.
Les tests réalisés en laboratoire sont complétés par des expérimentations menées sur le terrain par des groupes de sportifs ou des guides de montagne dans les conditions réelles, comme ici pour les vestes Vassi GTX Pro de l’équipementier suédois Haglöfs. DR

Avec, à la clé, une membrane qui offre des possibilités d’utilisation dans les industries pharmaceutiques et médicales, les biotechnologies ou encore l’aéronautique. C’est une aubaine incroyable pour la structure familiale ! Aujourd’hui, l’entreprise intervient dans des secteurs aussi variés que les carburants, l’aérospatial, l’automobile, la téléphonie ou encore l’énergie. Peu connue du grand public, la division médicale est la plus importante en chiffre d’affaires, notamment grâce à ses appareils de soins cardio-vasculaires.

Gore-Tex, la division textile de Gore, développe des produits techniques pour le lifestyle, mais également des textiles à haute protection pour les pompiers et les militaires du monde entier. La compagnie possède des bureaux et des sites de production aux Etats-Unis, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Chine et au Japon. Et des unités commerciales partout dans le monde. « Pour les vêtements et les chaussures, précise un membre de l’équipe, les premiers marchés sont l’Allemagne, la Suisse, l’Autriche, puis la Scandinavie, le Royaume-Uni, et enfin l’Italie, la France et l’Espagne. »

La « science du confort »

Dans la salle de réunion du centre de R&D, Mike Adams, le responsable des lignes de vêtements de sport d’hiver de Gore-Tex, insiste sur quelques éléments de langage de la maison, notamment les recherches permanentes en matière de « science du confort ». « Nous avons créé le marché du textile waterproof il y a quarante-cinq ans, affirme-t-il. Et nous n’avons jamais relâché nos efforts sur l’innovation. »

Dans une salle immense du Durability Lab, 200 lave-linge servent à tester la durabilité des vêtements Gore-Tex.
Dans une salle immense du Durability Lab, 200 lave-linge servent à tester la durabilité des vêtements Gore-Tex. DR

Aujourd’hui, la marque propose un catalogue de 600 textiles, de deux ou trois épaisseurs selon les catégories. La plupart sont waterproof ou windproof. Pour développer un nouveau produit et l’intégrer au modèle d’une marque partenaire, cela peut prendre jusqu’à quatre années. Parmi les innovations commercialisées à l’automne 2020, trois nouveaux types de tissus imperméables et respirants apparaissent au sein de la gamme Gore-Tex Pro. Des marques comme Arc’teryx, Millet et Patagonia les ont déjà adoptés.

Dans sa quête d’amélioration du bien-être des individus face aux éléments, l’entreprise a créé de nombreux laboratoires. Dans l’étonnante chambre climatique du Biophysics Lab, par exemple, 85 % des conditions climatiques existantes sur terre sont reproduites. Le vent, la pluie, la neige, le froid polaire, l’humidité de la jungle, le soleil qui tape en haut des sommets : tous les cas de figure sont pris en compte.

Des rain towers installées dans des raining rooms permettent de reconstituer les pluies diluviennes, les gros orages et les tempêtes. L’expérience est bluffante. Vous pénétrez dans la cabine avec une combinaison intégrale, vous passez de longues minutes sous un rideau de pluie, et vous en ressortez totalement sec ! Sur le même principe, une salle avec des lampes simulant la lumière solaire permet de tester la résistance à la chaleur.

En laboratoire, les gants sont soumis à des tests d’étanchéité.
En laboratoire, les gants sont soumis à des tests d’étanchéité. DR

Les textiles sont également soumis à des tests de contamination pour s’assurer de leur stabilité en cas de contact durable et répété avec des répulsifs pour insectes, la transpiration, l’essence ou encore les détergents. Ils sont aussi placés sous des rayons solaires qui reproduisent l’exposition aux UV en accéléré.

Les couleurs et la membrane doivent rester inchangées. Bien entendu, tous les tests effectués en laboratoire sont complétés par des expérimentations sur le terrain, dans la nature, réalisées par des groupes de sportifs et des guides de montagne dans les conditions réelles. Une fois les matières mises au point, une deuxième phase de tests est lancée, pour contrôler leur intégration aux produits des marques, avant leur mise sur le marché. Ainsi, au Footwear Lab, les chaussures sont garnies d’un bootie (une chaussette en textile technique), puis plongées dans des bains et des centrifugeuses pendant plusieurs jours. A la moindre faille de l’étanchéité, le produit est recalé, puis décortiqué pour être repensé.

Gore-Tex, le développement durable pour fil rouge

Parmi les examens rigoureux auxquels Gore-Tex soumet ses produits, ceux du Durability Lab occupent une place à part. En effet, comme l’explique Mike Adams, le développement durable est au coeur des valeurs de l’entreprise depuis le départ. Or, en appliquant la célèbre méthode de calcul de l’impact environnemental Life Cycle Assessment (LCA) aux procédés internes, il est apparu que le meilleur moyen de diminuer l’empreinte carbone de l’un de leurs vêtements est tout simplement d’en augmenter la durée de vie. Au Durability Lab, on teste donc la qualité des produits du point de vue de leur résistance au lavage, à l’essorage et au séchage (dans une immense salle où sont alignés 200 lave-linge), ainsi que leur robustesse en cas de frottement avec des surfaces rocheuses ou des pics.

Les vêtements Gore-Tex sont évalués sur le terrain en situation réelle après avoir été testés en laboratoire, où diverses conditions climatiques sont reproduites.
Les vêtements Gore-Tex sont évalués sur le terrain en situation réelle après avoir été testés en laboratoire, où diverses conditions climatiques sont reproduites. DR

En parallèle, Gore s’engage à limiter son empreinte écologique dans ses processus de fabrication : l’entreprise respecte le standard 100 du label Oeko-Tex depuis 1996, elle a adopté le système Bluesign en 2010, elle utilise un maximum de Nylon et de polyester recyclés comme matières premières, et elle a mis en place un programme d’accompagnement en partenariat avec l’ONG Greenpeace. En outre, tous les sites de production de Gore-Tex dans le monde seraient certifiés Fairtrade par des organismes indépendants. Des avancées indispensables à l’heure où les consommateurs exigent le respect de leur planète et de leurs congénères.


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