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Design suisse : les marques et éditeurs icôniques
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Horlogerie

Design suisse : les marques et éditeurs iconiques

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La formule « less is more » va comme un gant au design suisse lorsqu’on vient à parler d’éditeurs et de marques présentes aussi bien localement qu’internationalement. Une liste resserrée donc, mais incontournable.

Les éditeurs et marques de design suisse par The Good Life.

Vitra

Pour tous les amateurs de design, Vitra est l’une des références absolues. La marque suisse a acquis cette position en devenant, dans les années 50, 60 et 70, le licencié européen des Eames et autres figures de proue du modernisme américain. Depuis le tournant des années 80, Vitra développe, édite et commercialise le nec plus ultra des meubles de designers internationaux. C’est le cas de Jasper Morrison, Ronan et Erwan Bouroullec, Verner Panton, Maarten Van Severen ou Konstantin Grcic. Tout en rééditant des classiques, à l’instar du mobilier de Jean Prouvé.

Une collection ciblant aussi bien le marché du contact que celui du résidentiel, et qui s’expose, tel un catalogue raisonné, à Weil am Rhein, dans cet écrin architectural dédié qu’est la VitraHaus, imaginée par les architectes bâlois Herzog & de Meuron.

Le complexe unique d’architecture contemporaine de Vitra traduit toute la philosophie commerciale et culturelle du fabricant de meubles suisse qui s’est entouré des plus grands noms du design pour penser ce site.
Le complexe unique d’architecture contemporaine de Vitra traduit toute la philosophie commerciale et culturelle du fabricant de meubles suisse qui s’est entouré des plus grands noms du design pour penser ce site. DR

Fondée en 1950, à Weil am Rhein, par Willi et Erika Fehlbaum, Vitra est l’éditeur « gute Design » par excellence. C’est lors d’un voyage aux Etats-Unis, en 1953, que Willi Fehlbaum découvre le travail de Ray et Charles Eames dans un magasin new-yorkais. Il approche aussitôt la firme Herman Miller, basée à Zeeland (Michigan), qui est alors l’éditeur historique des plus grands noms du design moderne américain. Les Eames donc, mais aussi Georges Nelson et Isamu Noguchi.

Et, en 1957, il finit par en devenir le licencié européen exclusif. En Europe, c’est la rencontre, au début des années 60, avec le designer danois Verner Panton, en quête d’un fabricant pour sa chaise en plastique moulé, qui sera elle aussi décisive. De fabricant licencié éclairé, Vitra se mue en éditeur à part entière. La Panton Chair entrera au catalogue en 1967. Mais aussi en spécialiste de mobilier de bureau ergonomique (chaise Vitramat, en 1976).

La Panton Chair a été créée par Verner Panton en 1960 et est un classique de l’histoire du mobilier.
La Panton Chair a été créée par Verner Panton en 1960 et est un classique de l’histoire du mobilier. DR

Les architectes les plus respectés

L’arrivée de Rolf Fehlbaum et de son frère à la tête de l’entreprise en 1977 marque un nouvel essor. A la suite de l’incendie qui ravage la plus grande partie du site de production en 1981, les architectes les plus respectés (Frank Gehry, Zaha Hadid, Herzog & de Meuron, SANAA) sont invités à construire plusieurs bâtiments sur le terrain de Weil am Rhein. Le résultat ? Le Vitra Campus, un véritable parc d’architecture évolutif dont tous les bâtiments sont à la fois totalement fonctionnels (sauf peut-être la caserne Zaha Hadid…) et de véritables manifestes architecturaux.

A la suite du décès de Ray Eames, en 1988, et de la dispersion du studio à Los Angeles du couple de designers américains le plus célèbre, Vitra acquiert la collection complète des prototypes, et est toujours en contact étroit avec les héritiers et la fondation. L’année 2004 marque le lancement de la Vitra Home Collection, dans laquelle des meubles signés Jasper Morrison, Ronan et Erwan Bouroullec ou Hella Jongerius viennent rejoindre les icônes des années 50 rééditées. La collection offre aujourd’hui un panorama exhaustif de la création la plus exigeante en design, comme le démontrait d’ailleurs à Milan l’exposition Typecasting, mettant en avant 200 meubles sélectionnés dans les archives maison par Robert Stadler lors du Salone 2018.

Vitra a développé plusieurs projets en coopération avec le designer Jasper Morrison dont la Basel Chair.
Vitra a développé plusieurs projets en coopération avec le designer Jasper Morrison dont la Basel Chair. VitrA

Il est vrai que Vitra ne se contente pas d’éditer les meilleurs designers et de commercialiser leurs créations ; l’entreprise partage également son intérêt et sa culture du design au travers des expositions qui se succèdent au Vitra Design Museum. C’est sans doute d’ailleurs la passion que porte Rolf Fehlbaum aux icônes du design – il les collectionne depuis des décennies – qui a été le déclencheur du rachat, en 2013, de la marque finlandaise Artek (créée en 1935 par Alvar Aalto). Marque restée familiale en dépit de sa stature de leader international, Vitra est passée en 2012 aux mains de la troisième génération, avec la nomination de Nora Fehlbaum qui entend bien faire rayonner le mobilier Vitra – et la réputation de sérieux des marques suisses – dans le monde.

Herman Miller et Vitra… un gentlemen’s agreement

De 1957 à 1984, Vitra détenait la licence Herman Miller – éditeur historique des Eames – pour l’Europe. Au terme de ce contrat, l’américain Herman Miller axe sa stratégie commerciale sur le mobilier de bureau. Afin de développer ce segment sous son seul nom en Europe et de ne pas léser Vitra, il cède, en contrepartie, à l’entreprise suisse les droits de fabrication et de distribution de tout le mobilier des Eames, de George Nelson, ainsi que des textiles d’Alexander Girard pour l’Europe. Résultat : quand vous achetez une chaise signée Eames à New York, elle est griffée Herman Miller, tandis qu’à Paris, elle sera griffée Vitra.


USM Haller

Design intemporel, style inimitable, possibilités infinies… les enfilades USM Haller s’intègrent parfaitement à tous les intérieurs.
Design intemporel, style inimitable, possibilités infinies… les enfilades USM Haller s’intègrent parfaitement à tous les intérieurs. DR

La modularité légendaire des meubles de l’entreprise familiale USM (créée en 1855) ne découle pas d’une pseudo‑stratégie marketing surfant sur « la quête de personnalisation des consommateurs » comme le veulent les formules dont on est aujourd’hui inondés. Mais bel et bien d’un besoin de l’entreprise USM elle-même d’optimiser, au début des années 60, l’aménagement de son nouveau complexe de production et d’administration, situé à Münsingen, près de Berne. L’architecte Fritz Haller, à qui avait été confié la conception du bâtiment, décide alors d’appliquer son système Mini-Midi-Maxi – un concept de construction à ossature métallique, imaginé en 1963, s’adaptant à des édifices de différentes tailles – pour créer des solutions de rangement flexibles.

Bibliothèque USM Haller.
Bibliothèque USM Haller. Christophe Glaudel

Du MoMA à la fondation Louis Vuitton

En 1965, le brevet de la sphère de connexion des dorénavant classiques structures tubulaires habillées de panneaux de métal thermolaqué, parfait exemple de smart design autorisant des configurations quasi infinies, était déposé.

USM Haller est entré dans la collection permanente du MoMA en 2001. Et a étendu, depuis 1989, son offre aux tables relevables (Kitos), tandis que ses systèmes de rangements continuent de séduire aussi bien les puristes n’écrivant qu’en Helvetica, que la fondation Louis Vuitton. Cette dernière en a équipé les bureaux du vaisseau de verre de Frank Gehry. Ou encore les bureaux d’Ernst & Young à Zurich, pour ne citer que quelques exemples parmi d’autres.


Punkt

Fondée à Lugano en 2008 par le Norvégien Petter Neby, Punkt véhicule parfaitement les valeurs de simplicité, de fonctionnalité, de lisibilité et de durabilité si emblématiques du design suisse. Cette marque de niche, dédiée au petit électronique premium, pourrait être définie comme un croisement de Braun et d’Apple.

Elle a lancé son premier produit – un téléphone sans fil – sur le marché fin 2010, et a confié, dès l’origine, la direction artistique de sa courte collection (téléphones, multiprises, réveil) à Jasper Morrison. Le designer britannique partage l’approche éthique et esthétique de Punkt. Y compris la nécessité de pouvoir, à des moments choisis, se déconnecter.

Le Punkt MP02, téléphone minimaliste par excellence.
Le Punkt MP02, téléphone minimaliste par excellence. DR

Tout sauf un smartphone

Chez Punkt, on affirme volontiers que la surenchère actuelle de fonctionnalités des produits high-tech n’est pas pour autant synonyme d’allègement du quotidien. Bien au contraire même, puisque le fait de garder les yeux baissés sur un écran nous empêche plutôt de regarder ce qui se passe autour de nous… D’où le Punkt MP02 présenté au Mobile World Congress de Barcelone, début 2019.

Avec son look de petite calculatrice que n’aurait pas renié Dieter Rams, ce téléphone mobile singulier et fier de l’être se refuse toujours à être un smartphone. Mais il capte en revanche très bien la 4G afin de pouvoir se muer en hotspot pour tablettes ou ordinateurs. De quoi faire mentir l’argument qui consiste à dire que la seule alternative à l’hypertechnologie serait le vintage low tech.


De Sede

Comment ne pas être expert dans le travail du cuir dans un pays qui compte autant de pâturages d’alpages ? Et la réputation de De Sede dans la fabrication de fauteuils, de canapés et autres lits de repos dans les plus beaux cuirs, lisses ou grenés, est incontestée. Tout a commencé à Klingnau, près de la frontière allemande, avec un modeste atelier de sellerie‑maroquinerie.

Dès 1962, le travail de capitonnage, effectué de façon traditionnelle par des artisans précis et rigoureux, a pris de l’essor et, en 1965, l’entreprise familiale établie par Ernst Lüthy a pris ouvertement le virage du meuble haut de gamme en faisant appel à des designers avant-gardistes, et en adoptant, par la même occasion, le nom de De Sede.

Icône du design des années 70, le canapé DS-600 de De Sede est constitué d’éléments indépendants reliés entre eux par une fermeture à glissière. Ici, dans le magnifique lobby du New Hotel Voltaire, le nouvel hôtel du groupe Antoun, à Paris.
Icône du design des années 70, le canapé DS-600 de De Sede est constitué d’éléments indépendants reliés entre eux par une fermeture à glissière. Ici, dans le magnifique lobby du New Hotel Voltaire, le nouvel hôtel du groupe Antoun, à Paris. DR

Audacieux et glam

Parmi les pièces iconiques qui s’arrachent sur le marché du vintage et qui sont, pour certaines d’entre elles, toujours en production, il faut, bien sûr, citer le canapé DS-600, créé en 1972 par Ueli Berger, Eleonora Peduzzi Riva, Heinz Ulrich et Klaus Vogt. Modulable de façon ingénieuse, car constitué d’éléments indépendants reliés entre eux par des fermetures à glissière et par un système de rotules invisibles, il serpente très sensuellement dans les lobbys d’hôtels et les espaces de coworking, surfant sur le revival seventies. Ainsi que dans les intérieurs d’amateurs de design audacieux et glam.

Le canapé DS-1025 possède un design puissant qui forme une « chaîne » de canapés-collines.
Le canapé DS-1025 possède un design puissant qui forme une « chaîne » de canapés-collines. DR

Ou encore le canapé Terrazza DS-1025, de 1972 lui aussi, imaginé par Ubald Klug (formé au design auprès de Willy Guhl) et constitué de sept coussins dégradés. Une silhouette, identifiable entre mille, qui évoque également les courbes des cartes topographiques. Il y a donc fort à parier que les créations plus contemporaines signées Alfredo Häberli, Paolo Piva, Ini Archibong, Werner Aisslinger ou Santiago Calatrava deviendront elles aussi des piliers du catalogue de De Sede.


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