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La nouvelle adresse automobile des Champs-Élysées signée Renault revêt une forme inédite, entre le musée Guggenheim de New York et un garage Fisher Price. Un concept qui mérite explication.
Au 53 de l’avenue des Champs-Élysées, le dernier des grands showrooms automobiles a bien failli disparaître. Pour mieux renaître. Le lieu, choisi dès 1910 par Louis Renault pour sa proximité avec le Grand Palais, là où avait lieu le Salon de l’auto, a vécu plusieurs vies, devenant le fameux Pub Renault (« Pub » pour « publicité »), inauguré par Michèle Morgan en 1963. Voici l’avènement du Défilé Renault.
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Deux ovales pour un losange
Nombre d’entre nous y sont allés, enfants, fascinés par ses expositions, ses événements et ses alcôves rappelant les premières automobiles : on y mangeait un steak ou, comme Arnaud Belloni, le patron du marketing du groupe Renault, on y savourait une glace. « C’était un lieu extrêmement moderne à l’époque, un lieu de pop culture », analyse-t-il.

Puis dans les années 1990, le Pub a été transformé en Atelier Renault, surfant sur la tendance des lofts. Avant de subir la crise qui a frappé tous les lieux automobiles des Champs-Élysées : Peugeot, Toyota, Mercedes, Fiat, Citroën, tous désertent, un par un, la prestigieuse avenue. Et lorsque Arnaud Belloni arrive chez Renault en 2020, en plein Covid et alors que l’entreprise subit des pertes records de 8 milliards d’euros, l’avenir du showroom au losange ne tient qu’à un fil.
Mais c’est le moment où le plan « Renaulution » est pensé par l’ancien P-DG, Luca de Meo, une stratégie de valeur plutôt que de volume : le lieu tient là sa chance. « Un écrin merveilleux pour notre future gamme, explique Arnaud Belloni. Nous avons fait un module concept pour valider tout ce qu’on voulait voir dedans : restaurant, boutique, expositions dynamiques, possibilités d’acheter une voiture, point de départ pour des tours de Paris en 4L, privatisation pour des fêtes, espaces de coworking… » Les idées ne manquaient pas, mais il fallait encore déterminer la forme adéquate de cette restructuration totale pour les mettre en musique.

Le concept du lieu est venu à Franklin Azzi dès sa sortie du brief de Renault. « J’ai fait un croquis qui était déjà pratiquement ce que nous avons réalisé », raconte l’architecte français. Son projet suscite tout de suite l’enthousiasme. « Le terrain de jeu d’une marque auto est la route et Franklin Azzi a créé une route sans fin, précise Arnaud Belloni. En voyant le projet, on a compris que c’était un lieu pour défiler, comme un catwalk, transformé en “carwalk” pour les voitures. D’où le nom, le Défilé Renault. »
Défilé Renault : voyage dans l’espace
Les quelque 2 350 mètres carrés de surface disponible sont repensés, vidés pour créer le maximum de volume possible. « C’est un projet très ambitieux d’un point de vue architectural, il est unique, prototypal, explique Franklin Azzi. Nous voulions reconnecter l’espace avec les Champs-Élysées, avec des codes de grands lieux culturels. » Voire de culte, comme en atteste cette immense nef avec 16 mètres de hauteur maximale sous plafond et un chœur ! Car il fallait ménager l’espace nécessaire pour installer le point d’orgue des lieux, une rampe en pente douce de 4 % d’une longueur de 170 mètres.

Franklin Azzi revendique ici l’influence des travaux de Claude Parent et de Paul Virilio sur l’architecture oblique et le plan incliné, ainsi que de réalisations comme le musée Guggenheim de New York, le Lingotto à Turin ou encore… le garage Fisher Price de son enfance avec ses rampes hélicoïdales. Résultat, une rampe tournant deux fois qui permet d’avoir une façade à exposition multiple derrière la vitrine de 185 mètres carrés tout en transparence – l’orientation plein nord affranchissant de toute question thermique pour privilégier la luminosité.
La construction de la rampe avec Vinci a représenté un véritable défi, en raison du choix de privilégier des portants selon le principe de suspension sur une structure métallique, comme pour un ouvrage d’art, plutôt que de créer des poteaux qui auraient abîmé l’image de légèreté voulue. « Il s’agit de sculpter le vide plutôt que le plein », résume poétiquement Franklin Azzi. Une rampe en béton quartzé de 5,20 mètres de large avec un vocabulaire visuel autoroutier, entourée de garde-corps en verre pour, toujours, conserver cette impression de légèreté. Un authentique écrin conçu pour recevoir une quinzaine de voitures en exposition comme à la parade.

Sur les murs, une enveloppe de lattis de bois de chêne vernis a été choisie pour offrir une certaine chaleur aux lieux et pour les propriétés acoustiques de ce matériau. L’ouverture au public a été fixée au 17 septembre, après à peine trois ans de travaux, et la star ici est le produit, à commencer par la Renault 4, qui ouvrira le défilé des expositions dans ce lieu voulu dynamique, festif et ouvert à tous.
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