The Good Business
Classique, lyrique, jazz, électro, théâtre, danse… les festivals sont devenus de véritables phénomènes de société artistiques et populaires, et une source de rayonnement culturel pour les villes qui les accueillent. Tour d’horizon…
Répertorier les festivals donne le vertige, surtout en France où environ 1 500 événements ont été recensés en 2017. Le plus vieux ? Le Festival des filets bleus, créé en 1905 à Concarneau. Ces festivités flirtent généralement avec l’été : 42 % se déroulent en juillet-août. Notamment les Eurockéennes de Belfort, Rock en Seine, les Francofolies de La Rochelle, Jazz in Marciac, les Vieilles Charrues ou encore Jazz à Vienne.
Certains s’exportent même, à l’image du Montreux Jazz Festival, en Suisse, connu pour ses affiches signées des plus grands artistes (Keith Haring, Andy Warhol ou Niki de Saint Phalle) et coédité à São Paulo (depuis 1978), ainsi qu’à Detroit, Atlanta, Tokyo et Monaco. La question du financement d’une telle manifestation est primordiale et constitue souvent un casse-tête pour les organisateurs. Ils doivent jongler entre demandes de subventions publiques, recours aux partenaires privés (mécènes, sponsors) et recettes de la billetterie.
« L’organisation est un sacré parcours en termes de budget, même si nous avons beaucoup de chance à Avignon », explique Paul Rondin, directeur délégué du Festival d’Avignon. Celui-ci a en effet reçu 12,6 millions d’euros de subventions publiques en 2017, dont 55 % de l’Etat. Le reste du financement public a été assuré par la ville d’Avignon, la communauté d’agglomération, la région et le département. Le Festival bénéficie aussi de mécènes comme le Crédit coopératif ou la fondation SNCF. Quant aux retombées, elles sont exceptionnelles : 100 millions d’euros.
Cependant, la situation est rarement aussi favorable. « Nous avons un certain goût pour la prise de risques, indique Jean-Paul Montanari, directeur de Montpellier Danse. D’autant plus que notre festival dure toute l’année. » Budget de la manifestation : 3,5 millions d’euros. Un seul mécène participe à l’aventure, la fondation BNP Paribas. Certains voient leur financement évoluer, comme le Dublin Dance Festival, créé en 2002 par Catherine Nunes. « Avant, le Festival était soutenu par des petits sponsors, explique Benjamin Perchet, à la direction artistique. Aujourd’hui, il est soutenu par l’Arts Council [organisme national irlandais chargé de la promotion des arts, NDLR]. » Avec un budget estimé à 450 000 euros cette année, il bénéficie, en outre, des subventions de la fondation BNP Paribas (encore elle !) et de la fondation d’entreprise Hermès. Pourtant, « c’est un festival à taille humaine, note Benjamin Perchet. Ce sont 12 000 spectateurs qui y assistent chaque année, avec un prix du ticket allant de 15 à 55 euros. »
Etant donné l’éclairage culturel et les nombreuses retombées financières pour les acteurs du tourisme locaux apportés par les festivals, les villes cherchent à se démarquer pour attirer le public. « Notre objectif est de produire des artistes qu’on ne voit pas ailleurs, explique Jan Goossens, directeur artistique depuis deux ans du Festival de Marseille. Et cela afin d’en faire un rendez-vous multiculturel, international, accessible et populaire. » Le festival, qui bénéficie d’un budget de 2 millions d’euros, a accueilli 25 000 spectateurs en 2017. Son public a tendance à rajeunir et à se diversifier, grâce à une billetterie solidaire de 2 000 places à 1 euro.
Créé il y a vingt-huit ans par Jakes Abeberry, le festival Le Temps d’aimer la danse (budget de 650 000 euros) renoue avec la passion de Biarritz pour cet art depuis les ballets organisés par le marquis de Cuevas dans les années 50. Une manifestation qui « présente aujourd’hui la fine fleur en termes de compagnies contemporaines et internationales, explique Eloixa Ospital, chargée de communication. Notamment depuis que Thierry Malandain, directeur du centre chorégraphique national (CCN) de Biarritz, a repris sa direction artistique en 2009. »
Comme quoi, imaginer son festival, c’est aussi élaborer un story-telling qui donne un nouveau visage à une ville ou même à une région. Ce type d’événement culturel constitue un véritable outil de communication, voire de commercialisation. Et, pour revenir à Biarritz, les résultats sont là : 10 jours, 50 rendez-vous, 18 000 spectateurs, 27 compagnies, 725 nuitées, 2 500 repas servis dans 22 restaurants partenaires.
Lire aussi
Attable, un prototype de festival gastro à Lyon
Pitchfork Music Festival 2017 : un cru plein de surprises à Paris