Getaway
The Good Guide
Sur le Nil, la dahabieh réinvente l’art de voyager : lenteur choisie, navigation au gré des vents et immersion dans une Égypte intemporelle. Avec Lazuli Nile Cruises, cette expérience devient un manifeste de simplicité élégante, entre repas végétariens à partager, haltes sur des sites préservés et nuits bercées par le silence du fleuve. Une aventure qui conjugue l’histoire millénaire aux plaisirs d’un tourisme à taille humaine.
Il suffit d’apercevoir le mythique Sundan, bateau de Mort sur le Nil (Agatha Christie, 1937), pour saisir la grâce intemporelle de notre dahabieh. Bientôt, Lazuli Nile Cruises – première compagnie égyptienne à proposer des bateaux authentiques à voile latine – mettra à l’eau une embarcation inspirée de ce chef-d’œuvre littéraire : un sublime bateau à vapeur de 26 suites, proposant une croisière sur le Nil du Caire à Assouan de quatorze jours. Mais pour l’heure, notre dahabieh dotées de dix cabines, une des neuf embarcations de la flotte de Lazuli Nile Cruises, l’entreprise de Wally Aziz, file discrètement en direction de sa prochaine halte. « On ne sait pas à quelle heure nous arriverons », explique-t-on aux passagers inquisiteurs, curieux d’assister au passage d’une écluse. « Ce sont les joies de la navigation ».
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L’écluse d’Esna est franchie au petit matin, après un petit-déjeuner hybride où le Nutella côtoie le « foul » – ces fèves cuisinées au citron et à l’ail. Pendant que l’équipage salue les officiels, des vendeurs de nappes et d’habits traditionnels interpellent les passagers depuis leurs barques, criant les prix en euros.
« Il y avait un embouteillage hier soir », glisse le capitaine pour expliquer ce décalage matinal. Car sur le Nil, les bateaux de croisière abondent, rivalisant d’envergure avec les paquebots transatlantiques. Si leur confort spacieux s’impose, leur esthétique froide contraste avec l’authenticité des dahabiehs, ces navires élancés où chaque instant évoque un retour dans le temps.
La dahabieh : au fil du Nil
La dahabieh, ce navire au nom doré – littéralement, puisque « dahab » signifie or en arabe – n’a jamais eu vocation à briller dans la démesure. Longiligne et silencieuse, elle a pourtant traversé les siècles avec une élégance rare, flirtant avec les vents du Nil pour transporter marchandises, voyageurs et histoires entre Assouan et Le Caire.
Dès l’Antiquité, la dahabieh s’inscrit dans le quotidien des Égyptiens. Longue d’une trentaine de mètres, équipée de ses voiles latines caractéristiques, elle devient l’outil parfait pour naviguer sur le Nil, à la fois autoroute et épine dorsale d’un pays où tout ou presque converge vers le fleuve. Pas de moteur, pas de bruit – juste un courant parfois capricieux et des brises bienveillantes. Pendant des siècles, elle fait le lien entre les temples millénaires et les villages, discrète et efficace.
Puis vient le XIXe siècle. L’Égypte devient une obsession pour l’Europe : l’expédition napoléonienne, le déchiffrage des hiéroglyphes, les premières fouilles archéologiques… C’est l’âge des explorateurs et des amateurs fortunés en quête de grandeur antique. La dahabieh change alors de rôle : elle se mue en hôtel flottant. On y installe des cabines cossues, des salons où discuter de la beauté des temples de Karnak et des cuisines capables de nourrir l’appétit des Européens pour l’orientalisme.
Croisière sur le Nil : « slow » tourisme et perfusion d’histoire(s)
La dahabieh est aussi un manifeste de lenteur. Cinq jours sont nécessaires pour découvrir l’ensemble des étapes culturelles qui mènent de Louxor à Assouan là où les paquebots de croisière compressent ce temps de moitié sur le Nil. Si l’embarcation traditionnelle naviguait naguère au gré du vent (il arrive aussi à la nôtre d’hisser les voiles quand le temps le permet), la flotte de Lazuli Nile Cruises, dépourvue de moteur, se fait tracter par un modeste mais puissant bateau motorisé — un bon moyen de respecter la tradition et de réduire son empreinte environnementale. Ainsi, les paysages défilent moins vite devant nos yeux, à travers les petites fenêtres des cabines de l’Abydos. On distingue un groupe d’enfants qui s’amusent autour d’un chien. Un troupeau de bétail broutant sur une rive fertile. Au loin, une montagne mystique. Plus près, une carrière présentant d’étranges ouvertures — elle servit à la construction les temples du l’Ancien Empire.
En ralentissant le rythme de notre course contre l’histoire, la dahabieh permet aussi à nos cerveaux hyperactifs de comprendre qu’ils ne sont pas en train de rêver. Hier, nous visitions la vallée des rois et les tombeaux de Ramsès IV et Sethi Ier. Demain, il s’agira du site de Kom Ombo où était vénéré Sobek, dieu à la face de crocodile, maître des eaux du Nil (huit momies de ces reptiles sont exposées dans un petit musée). Mohammed Souleymane, guide francophone formé à l’égyptologie à l’université du Caire, accompagne cette croisière sur le Nil dans sa totalité, nous permettant d’étoffer un peu notre culture générale avec, toujours, un trait d’humour bienvenu après six jours de visite dans les couloirs du temps.
Se soumettre au ballet de la dahabieh, accepter de déjeuner et de diner en groupe, au signal du chef de croisière, c’est aussi s’octroyer une pause bien méritée. Grâce à Lazuli Nile Cruises, rien n’est laissé au hasard : chaque détail est communiqué en amont du séjour afin de limiter les surprises — bien qu’on le répète : « les joies de la navigation »… Bien que préparé aux visites et aux « happenings » (la soirée chic, le goûter sous la tente…), l’équipage excède les attentes. Cette tente est en fait un véritable petit campement déployé sur un site préservé, très vert, où le goûter se tiendra au coucher du soleil et où le diner sera servi sous la forme d’un buffet de grillade à la chaleur d’un feu de camp. Chaque midi, se sont des recettes végétariennes qui sont servies à table sous la forme de plats généreux à partager.
Lazuli Nile Cruises : opérateur complet
Lâchez prise : vous n’aurez pas le luxe de commander une salade tomates-mozza quand l’envie vous prendra de retrouver vos repaires — un repas « occidental » est néanmoins servi en cours de croisière. En revanche, il vous sera possible de compléter l’expérience Lazuli Nile Cruises avec une traversée supplémentaire de quelques jours sur le lac Nasser en direction d’Abou Simbel sur un bateau de la flotte.
Faire une halte à Louxor avant de voler en direction du Caire, afin de découvrir les fameuses pyramides, tombe aussi sous le sens pour s’offrir un bain de culture complet — et des souvenirs pour la vie. Bientôt, le retour au Caire permettra de prendre la route du désert blanc et de séjourner dans le nouvel écolodge Lazuli. Ou, d’opter pour une croisière plus longue sur le fameux bateau dépeint par Agatha Christie.
Les croisières Lazuli Nile Cruises sont au départ de Louxor les dimanches, pour une durée de 5 ou 6 nuits jusqu’à Assouan. Plus d’informations.
