The Good Business
Il n'est pas que le président du conseil d'administration d'Engie et du conseil d'administration de Suez. Gérard Mestrallet couvre aussi le rôle de président honoraire du conseil international de la municipalité de Chongqing. The Good Life l'a rencontré.
The Good Life : Vous vous rendez à Chongqing au moins une fois par an pour la réunion du « conseil international » du maire, que vous avez créé en 2006. À quoi ressemblait la ville lors de votre tout premier séjour, il y a quinze ans ?
Gérard Mestrallet : C’était une ville énorme, très polluée, qu’il fallait absolument moderniser. Suez a rapidement décroché des contrats dans le traitement des eaux usées. Chongqing se trouve en amont du barrage des Trois‑Gorges. Jusqu’alors, elle rejetait toutes ses eaux usées dans le Yangtsé. Mais une ville de 33 millions d’habitants qui déverse ses déchets dans un fleuve, en amont d’un barrage, vous pouvez imaginer les problèmes que cela pose avec l’accumulation des sédiments. Il fallait donc absolument traiter les eaux usées. Nous nous sommes ensuite positionnés sur la distribution d’eau. Aujourd’hui, à Chongqing, Suez dessert 1,5 million de personnes en eau potable. Par comparaison, je rappelle qu’en France la Lyonnaise des eaux a mis près d’un siècle pour obtenir ses 14 millions de clients actuels !
TGL : Au milieu des années 90, Chongqing était la ville la plus polluée de Chine, si ce n’est du monde. Où en est‑on aujourd’hui ?
G. M. : La ville a mis les bouchées doubles. C’était absolument nécessaire. En matière de qualité de l’eau potable, par exemple, Chongqing était pratiquement au dernier rang des grandes villes chinoises, il y a sept ou huit ans. Dorénavant, la ville est dans le top 3 national. Compte tenu de l’inertie que représente une ville aussi peuplée, c’est une vraie performance ! Concernant la pollution de l’air, la solution la plus rapide consisterait à basculer du charbon vers le gaz. Chongqing, justement, est très riche en gaz. C’est une zone très importante de production et de consommation. En plus, il est possible d’acheminer du gaz naturel liquéfié (GNL) par bateau, grâce au fleuve. Il existe un véritable marché. Il y a deux ans, j’ai donc proposé au maire de créer un hub gazier à Chongqing. Avec Shanghai, cela fait deux places de cotation en Asie pour un continent qui est le plus gros marché du monde pour le gaz et le GNL. Le maire a accepté. Tout a été lancé en janvier 2017.
TGL : En 2015, vous aviez convaincu François Hollande de faire une étape à Chongqing lors de son deuxième séjour en Chine en tant que président de la République. Chongqing semble vous tenir à cœur !
G. M. : François Hollande nous avait dit qu’il avait le temps de visiter une autre ville en plus de Pékin. Chongqing, c’est un autre regard sur la Chine, mais, en même temps, c’est un regard qui correspond à la réalité chinoise. A vrai dire, cela n’a pas été très difficile de le convaincre. Évidemment, ceux qui, dans son entourage, voulaient plutôt qu’il fasse étape à Shanghai ont été un peu déçus de voir que leur projet tombait à l’eau. [Rires.] Mais, honnêtement, il y avait aussi des raisons objectives. Chongqing, c’est la plus grande ville de Chine, voire du monde, avec une présence française significative… Autrement, on va toujours voir les mêmes entreprises françaises à Wuhan ! Chongqing, c’est toute une histoire… et son développement est la chose la plus spectaculaire qu’on peut voir dans le pays.
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