The Good Business
La Chine vient d'annoncer le développement d'une cellule de recherche autour de l'intelligence artificielle. Une politique qui s'inscrit dans le plan « Internet Plus » lancé il y a un an.
La Chine a donc décidé de passer aux choses sérieuses pour profiter du marché juteux de l’intelligence artificielle (IA). Quand Google se fait plaisir en promettant des robots artistes, le gouvernement chinois se fait plus terre-à-terre. En lançant son programme de recherche, il compte récolter plus de 15 milliards de dollars d’ici 2018. Trois années qui serviront surtout à rattraper le retard accumulé sur les Américains, selon le communiqué de la NDRC. Domotique intelligente, voitures et des objets connectés : l’objectif est de développer l’industrie locale dans ces domaines prometteurs.
Cette nouvelle cellule sera greffée au grand programme « Internet Plus » lancé en 2015. Un plan qui prévoit de développer l’utilisation d’internet dans tous les secteurs de l’économie. Lorsqu’on additionne internet à l’industrie (d’où le « plus »), cela se traduit par exemple par l’installation de logiciels connectés dans les voitures ou la possibilité de contrôler des machines à distance, tout en récoltant un maximum de données en temps réel. Et c’est justement là que l’intelligence artificielle se lie à l’internet des objets puisque les réseaux neuronaux au cœur de ces IA se nourrissent des données récoltées par les capteurs des objets connectés. Un marché qui génère des milliards de dollars par an et sur lequel la Chine compte assoir sa domination.
Toby Walsh, professeur en intelligence artificielle au NICTA, ne trouve pas surprenant que la Chine se lance à son tour dans le développement de l’IA. Selon lui, « il y a une vraie course au développement de nouvelles technologies pour mettre la main sur de nouvelles industries. On commence à faire de sérieux progrès, notamment avec Google et IBM. Des milliards de dollars sont misés sur le vainqueur de cette course… » Mais Pour Michael Littman, professeur d’informatique à l’Université Brown (Etats-Unis), les Chinois ne jouent pas dans la même catégorie car « ils ne cherchent pas à reproduire les capacités d’un cerveau humain. Leur utilisation de l’intelligence artificielle sera strictement commerciale. »
Comme pour chaque nouvelle avancée dans le développement de l’IA, se pose la question du risque lié aux utilisations nocives. Pour Toby Walsh, « les risques sont nombreux dans ce genre de course au progrès, car certaines de ces technologies peuvent tomber dans de mauvaises mains ». Signataire, avec 1000 autres scientifiques, d’une lettre ouverte contre l’utilisation de l’IA à des fins militaires, le chercheur ajoute que « de nombreuses entreprises seraient prêtes à mettre le prix pour développer des armes autonomes qui pourraient ensuite servir aux organisations terroristes ».
Elon Musk : « On ne sait pas ce qu'il va se passer une fois que l'intelligence artificielle aura dépassé celle du cerveau humain »
Pour autant, pas d’inquiétude pour l’instant. Car si la course à l’IA ressemble de plus en plus à celle pour l’espace dans les années 60, les enjeux ne sont pas les mêmes. Selon Max Tegmark, professeur au MIT et président du Future of Life Institute « il ne faut pas appeler cela une course. Il est naturel pour les nations les plus ambitieuses d’investir dans les dernières technologies ». Sur ce point, il est rejoint par Michael Littman : « Quand les Etats-Unis et la Russie s’affrontaient pour conquérir l’espace, la principale motivation était militaire, alors que l’intelligence artificielle est d’abord développée dans un but commercial. » Il ajoute même que « les outils et la technologie utilisée pour l’IA ne sont pas secrets, contrairement à l’époque de la course à l’espace ».
Zhongguancun, la Silicon Valley chinoise qui rapporte gros
Le technopôle de la région de Pékin, vieux de 30 ans, ne s’est jamais aussi bien porté…
La part de ses activités sur la croissance économique de Pékin est passé de 18 % à 37 % entre 2010 et 2015, avec 10 000 entreprises qui ont engrangé quelques 600 milliards de dollars. Et c’est loin d’être fini, rien que sur les deux premiers mois de l’année le Zhongguancun Park a rapporté 150 milliards de dollars. Il est le deuxième technopôle en terme de start-ups valorisées a plus d’un milliard de dollars (40), derrière la Silicon Valley. Avec un tel laboratoire, la Chine est prête à se lancer dans le business de l’intelligence artificielle.