Culture
L’Italie, Mexico, et les forêts impossibles de l’Arizona… Après vingt ans de carrière, les membres de Calexico reviennent sur leurs racines et sur leur présent, entre famille, frontière et magie.
Calexico, une danse autour du feu
Depuis longtemps, les membres de Calexico voulaient aller à la rencontre de leur Sud à eux et des nombreuses influences qui rendent leur musique unique, comme une sorte de Babel centraméricaine peuplée de guests du monde entier. C’est pour cette raison qu’après des années de flirt avec la musique mariachi ils ont décidé d’écrire et d’enregistrer une bonne partie d’Edge of The Sun, leur huitième et dernier album en date, sorti en avril 2015, à Mexico.
Puis ils sont partis en tournée à peu près partout dans le monde. Un travail lumineux et mélancolique, avec des invités prestigieux (Iron & Wine, Ben Bridwell de Band of Horses, etc.) et des chansons qui évitent toute démesure et qui invitent à danser autour du feu devant les incroyables couchers de soleil de l’Arizona, pendant une fête dans un petit village cubain ou sous la chaleur immobile du jardin d’un studio d’enregistrement mexicain, celui-là même où Joey et John ont jeté les bases de leur album. « Un tambour et une enceinte posés dans l’herbe. A l’extérieur, le son des instruments est très pur. Tout change dès qu’il y a un mur ou quoi que ce soit d’autre pour refléter les ondes. »
Pour John, la musique est un geste naturel et immédiat
Il en arrive parfois à maudire l’amplification nécessaire pour que leurs chansons atteignent des centaines de personnes. « Les grands festivals peuvent devenir de vrais cauchemars : il n’y a pas assez de temps pour faire le sound check et il faut simplement fermer les yeux et espérer que la magie de la musique dépasse tous les problèmes techniques qui se présentent. Heureusement, ça se passe bien la plupart du temps. »
Et si des centaines de spectacles affichant complet et d’apparitions sur les scènes les plus prestigieuses confirment que la magie résiste bien aux pires sonos, il est certain que, pour profiter dignement de Calexico, il suffirait en réalité d’un dive bar le long d’un highway poussiéreux dans le Southwest, l’un de ces endroits où John jouait avec sa famille quand il était enfant. Une piste en carrelage, des chaises sur les bords de la salle, une scène de quelques mètres et un tout petit orchestre au répertoire interminable : les « guinguettes », considérées chez nous comme les restes d’une époque dépassée, forment encore un pont entre les générations aux Etats-Unis. Après des années passées sur scène à diriger la danse, Joey Burns sait de quoi il parle. « Je trouve amusant de voir que la plupart des musiciens ne savent pas danser. Pourtant, quand on est enfant et qu’on écoute de la musique, nous sentons tous quelque chose bouger en nous. Puis nous grandissons. Certains arrêtent de peindre avec leurs doigts, d’autres de danser. Voir mes enfants danser est incroyable. Ils arrivent toujours à nous entraîner, ma femme et moi. Des enfants qui font danser leurs -parents, c’est le triomphe de l’amour sur le dancefloor. » Une histoire de racines, d’autant plus solides que le terrain se fait aride, pour un groupe inséparable de son contexte, lui-même inséparable du reste du monde.
Une app 100 % Calexico pour parcourir les montagnes de Santa Catalina
C’est peut-être de cet élan vers la nature qu’est né le Mount Lemmon Science Tour, un chapitre peu connu mais très significatif de l’histoire de Calexico. Si vous passez par Tucson, prenez le temps de visiter la forêt nationale du Coronado et son pic le plus haut, le mont Lemmon. En téléchargeant l’application dédiée et en parcourant le Catalina Highway en direction du sommet, vous serez guidé par la musique de Calexico et par la voix de Joey Burns, étonnant ranger à la voix chaude et accueillante qui vous décrira les merveilles et les dangers de part et d’autre de la route, du mystère des pins poussant en plein désert à la menace constante du feu, un fléau qui, avec la sécheresse, modifie depuis des années le -visage de cette région splendide.