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Blablacar : rencontre avec Nicolas Brusson, CEO du roi de la route
Blablacar : rencontre avec Nicolas Brusson, CEO du roi de la route
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The Good Business

BlaBlaCar : rencontre avec Nicolas Brusson, CEO du roi de la route

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Avec l’acquisition de Ouibus et le lancement d’une offre de bus longue distance, BlaBlaCar, déjà leader mondial du covoiturage, continue d’étendre son emprise sur les routes européennes... jusqu’en Amérique latine.

Si Roger Miller se rêvait en King of the Road, c’est en train de devenir réalité pour l’une des start-up françaises les plus célèbres et leader mondial du covoiturage. Avec 75 millions de membres, 350 salariés, une présence dans 22 pays et une croissance de 40 % de son activité entre 2017 et 2018, BlaBlaCar est valorisée à plus d’un milliard d’euros.

Une licorne française qui a annoncé, en septembre dernier, être rentable pour la première fois depuis sa création en 2006. Une situation qui n’a pas duré, puisque dans la foulée, en novembre 2018, BlaBlaCar rachète la filiale Ouibus à la SNCF et lève en parallèle 100 millions d’euros, investis par la SNCF, justement, et d’autres investisseurs de longue date.

Cette opération a permis à la start-up française de lancer, mi-juin, son offre de bus : BlaBlaBus. Le leader du covoiturage sort donc de sa zone de confort, pour diversifier et compléter son offre. Sur le plan international, BlaBlaCar semble avoir retrouvé la raison, après une expansion (trop ?) rapide qui aurait pu lui coûter cher.

Nicolas Brusson, co-fondateur et CEO de BlaBlaCar.
Nicolas Brusson, co-fondateur et CEO de BlaBlaCar. DR

L’interview The Good Life de Nicolas Brusson, co-fondateur et CEO de BlaBlaCar :

The Good Life : Pourquoi se lancer sur le marché du bus ?
Nicolas Brusson :
Lorsque le marché du bus a commencé à se libéraliser, nous étions trop occupés à nous développer à l’international. Puis, il y a près de deux ans, nous avons réalisé que notre empreinte mondiale était assez large, qu’il ne fallait pas ajouter des marchés pour ajouter des marchés. Nous avons donc décidé de nous lancer sur deux nouveaux axes de développement. Le covoiturage courte distance domicile-travail avec BlaBlaLines, déjà 300 000 trajets effectués, et le bus, qui nous permet de compléter notre offre sur les routes partagées.

The Good Life : C’est votre première expérience en dehors du covoiturage… Vous ne craignez pas de brouiller les esprits de vos usagers ?
Nicolas Brusson :
Les utilisateurs du covoiturage sont souvent les mêmes que ceux qui voyagent en bus pour de longues distances. Et, avec BlaBlaBus, ils auront toute l’offre proposée pour un même trajet, sur une seule plateforme.

BlaBlaCar vient de lancer BlaBlaBus avec 11 lignes en France. L’objectif est d’atteindre 70 lignes ouvertes en Europe d’ici la fin de l’année.
BlaBlaCar vient de lancer BlaBlaBus avec 11 lignes en France. L’objectif est d’atteindre 70 lignes ouvertes en Europe d’ici la fin de l’année. DR

TGL : Est-ce qu’il n’est pas trop tard pour affronter la concurrence ?
N.B. :
Si nous étions partis de rien, avec une petite flotte, le pari aurait été risqué. Mais nous avons choisi, en outre, de racheter Ouibus, un acteur déjà bien installé, dont le réseau dessert 300 villes en France et en Europe. Sur les marchés émergents, en Brésil, Russie et Ukraine par exemple, non plus, car il y a tout à faire. Là-bas, nous n’allons pas lancer nos propres bus, mais travailler avec des opérateurs locaux, améliorer leur booking online et rationnaliser leur distribution. Alors qu’en Europe occidentale, nous allons travailler avec des sous-traitants régionaux, qui opèrent les trajets pour nous et bénéficient d’un minimum garanti, mais les bus seront floqués « BlaBlaBus ».

« L’objectif, hors-Europe, est de mettre l’accent sur le Brésil, l’Ukraine et la Russie »

Les bureaux de BlaBlaCar à Paris, dans le 2e arrondissement.
Les bureaux de BlaBlaCar à Paris, dans le 2e arrondissement. DR

TGL : L’international justement, semblait au cœur de vos priorités ces dernières années… C’est toujours le cas ?
N.B. :
Oui, même si nous n’avons pas ouvert de nouveau marché depuis deux ans maintenant. La première phase de déploiement rapide et international du covoiturage, même si elle ne rapporte rien, nous a permis de créer de l’usage et une communauté. Aujourd’hui, l’objectif, hors-Europe, est de mettre l’accent sur le Brésil, l’Ukraine et la Russie. Cette dernière est d’ailleurs devenue notre premier marché, avec 20 millions de membres. Concernant les nouveaux marchés, on se permet de prendre notre temps, car il n’y a pas de concurrents locaux. Et s’il y en a qui se développent en Asie et en Afrique, alors on envisagera deux solutions : se lancer ou les racheter.

Les bureaux de BlaBlaCar à Paris, dans le 2e arrondissement.
Les bureaux de BlaBlaCar à Paris, dans le 2e arrondissement. DR

TGL : C’est d’ailleurs comme ça que vous avez réussi une expansion internationale aussi rapide…
N.B. :
Pas totalement. Mais c’est vrai qu’en Italie, en Europe de l’Est, en Russie, en Ukraine, en Allemagne et au Mexique, nous avons préféré faire de petites acquisitions de start-up de 3 ou 4 co-fondateurs qui travaillaient dans le domaine de l’économie collaborative, voire du covoiturage. On leur proposait de développer la marque dans leur pays et ils étaient autonomes concernant l’embauche et le marketing, à condition de ne garder qu’une seule marque : BlaBlaCar. La raison est simple, le prisme franco-français ne suffit pas pour connaître un marché étranger assez bien pour s’y lancer.

Pas de nouveaux marchés avant 2021

TGL : Quels sont vos objectifs à court terme ?
N.B. :
La prochaine étape est d’aller plus profond en Russie, Brésil et Ukraine, avant de nous focaliser sur le Mexique et l’Inde, deux autres marchés très importants sur lesquels nous sommes implantés sans pour autant y avoir installé des bureaux. Enfin, nous regarderons les marchés qui peuvent nous intéresser, en Asie et en Afrique, et pourquoi pas nous lancer. Mais pas avant 2021. Concernant l’Europe, le plus excitant et de savoir que nous aurons, pour la première fois, une empreinte visuelle : les bus seront aux couleurs de notre entreprise, contrairement aux voitures de nos usagers qui se fondent dans la masse.

BlaBlaLines est le nouveau service de BlaBlaCar pour le développement du covoiturage domicile-travail. Un marché d’utilisateurs quotidiens et plusieurs millions de clients potentiels.
BlaBlaLines est le nouveau service de BlaBlaCar pour le développement du covoiturage domicile-travail. Un marché d’utilisateurs quotidiens et plusieurs millions de clients potentiels. DR

En chiffres

• 75 millions de membres. 16 millions en France et 20 millions en Russie, son premier marché.

• Présente dans 22 pays.

• 350 salariés, 270 en France, les autres répartis entre ses 8 bureaux à l’étranger.

• Croissance d’activité de 40 % entre 2017 et 2018.

 


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