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axe historique avenue de la grande armée
L'avenue de la Grande Armée telle qu'imaginée.
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L’axe historique de Paris n’aura bientôt plus le même visage

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Cette perspective qui parcourt sur huit kilomètres les monuments emblématiques de la capitale va opérer une transformation radicale pour retrouver son caractère de promenade. Avec notamment une réduction de le place accordée aux voitures et des espaces piétons élargis et modernisés. Et en prime un nouvel emplacement pour la Vasque Olympique.

A Paris, la grande Histoire se matérialise par une perspective, comme une mise en scène du pouvoir. Dessinée par André Le Nôtre dès 1666, la Voie Royale, ou Axe Historique, concentre sur huit kilomètres les symboles du rayonnement français, du XVIe au XXIe siècle.

Du Louvre à la Défense, cet ensemble de segments relie les mythes napoléoniens, de la Concorde à l’Étoile, vers la Grande Armée, avant d’évoluer vers une modernité plus contemporaine, de la Porte Maillot à la Grande Arche de Mitterrand, en passant par l’avenue Charles-de-Gaulle à Neuilly-sur-Seine. Cet axe s’inscrit désormais dans une réinterprétation de son tracé. À l’heure des enjeux environnementaux, il s’agirait de verdir cette perspective et de retrouver l’esprit des grandes promenades plantées de la Belle Époque.


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Réenchanter les Champs-Élysées

Le plus gros chantier de cette réfection à venir concerne les Champs-Élysées, artère inchangée depuis 25 ans, qui va subir un réaménagement profond pour redorer une image quelque peu ternie. Le cabinet d’architecture PCA-Stream, dirigé par Philippe Chiambaretta, propose un projet pour « réenchanter » la plus belle avenue du monde et attirer à nouveau les Parisiens, qui l’ont progressivement délaissée. L’étude préconise une limitation du trafic, avec une réduction de 6 à 4 voies de circulation, ainsi qu’une augmentation de 13 % de l’espace réservé à la promenade par élargissement des trottoirs.

Les pistes cyclables seront également agrandies et sécurisées. Huit « salons végétaux » seront installés tous les 200 mètres, et le mobilier urbain sera repensé et équipé de capteurs permettant d’informer les visiteurs en temps réel sur la qualité de l’air ou la fréquentation des lieux culturels. Ce ne sont là que quelques-unes des 150 mesures proposées. « Nous estimons cette rénovation à 250 millions d’euros pour la prochaine mandature, il faut maintenant trouver les financements », explique Marc-Antoine Jamet, président du Comité Champs-Élysées, commanditaire de l’étude. Ces arbitrages feront certainement l’objet de débats lors de la prochaine campagne municipale de 2026.

Les Champs Elysées du futur ?
Les Champs Elysées du futur ? ©PCA-STREAM

Faire sauter le verrou de la Concorde

Selon les mêmes préconisations, la Concorde verra la surface dédiée aux piétons doublée au centre de la place afin de dégager la perspective vers l’axe historique, mais aussi vers l’Assemblée nationale et l’église de la Madeleine. Là encore, une réduction de la surface dédiée à la circulation est envisagée, ainsi que la plantation d’arbres. Cette opération est estimée à 37 millions d’euros. La traversée des Tuileries vers les jardins bas des Champs-Élysées sera ainsi grandement facilitée.

« La Concorde est aujourd’hui encore un véritable verrou qui empêche l’idée de promenade », déplore Marion Waller, ancienne conseillère d’Anne Hidalgo sur les questions de paysage et actuelle directrice générale du Pavillon de l’Arsenal. L’objectif premier est de redonner à ce grand espace vert du centre de Paris son usage de promenade, actuellement déserté par les promeneurs. Pour redonner aux jardins bas des Champs-Élysées leur fonction de « grand parc parisien », il est prévu d’y ajouter quelque 5 000 m² de prairie, 5 000 m² supplémentaires de massifs, ainsi que 160 nouveaux arbres.

Une projection du quartier de la Concorde pour le futur.
Une projection du quartier de la Concorde pour le futur.

La Vasque Olympique établie Porte Maillot ?

Autre place majeure de la perspective de l’Axe Historique de Paris, l’Étoile sera également transformée selon les mêmes principes : élargissement de l’espace piéton autour de l’Arc de Triomphe, réduction de la circulation de 10 à 7 voies, et création d’un anneau végétalisé autour de la place, ponctué de 12 salons végétaux. L’axe poursuit ensuite sa route vers l’avenue de la Grande-Armée, grande oubliée puisqu’il s’agit du seul tronçon à n’avoir connu aucun réaménagement depuis presque 100 ans.

La vision « Grande-Armée 2030 » ambitionne de lui redonner son caractère de promenade plantée : suppression des contre-allées, élargissement des trottoirs, réduction de la circulation de 6 à 4 voies, et réaménagement de la sortie du tunnel de l’Étoile, coiffée d’un belvédère pour offrir une vue sur l’Arc de Triomphe.

Surtout, l’avenue sera reconnectée au Bois de Boulogne, désormais prolongé jusqu’à la Porte Maillot, dont la transformation a déjà commencé avec des aménagements à 30 millions d’euros. Cette connexion sera symbolisée par un portique. La nouveauté du secteur réside dans la possible installation d’un héritage des Jeux Olympiques : selon Éric Donnet, président du Comité Grande-Armée, la Porte Maillot pourrait accueillir la Vasque Olympique, la plaçant à proximité directe du nouveau siège d’EDF.

L’avenue de la Grande Armée telle qu’imaginée.
L’avenue de la Grande Armée telle qu’imaginée.

L’Axe Historique de Paris… et plus loin encore

Située sur la perspective de l’Axe Historique de Paris, la ville de Neuilly-sur-Seine a également pris des mesures pour transformer son artère principale. Le concours des « Allées de Neuilly », lancé en 2016, touche à sa fin avec la réfection de l’avenue Charles-de-Gaulle. Seize « folies » — kiosques et pavillons contemporains — y seront bientôt édifiées, offrant des espaces culturels ou concept-stores. Montant total de l’opération : 70 millions d’euros.

La promenade se clôt à La Défense, dont l’esplanade subit une mue profonde pour devenir, à l’horizon 2027, un parc urbain de 5 hectares. Baptisé « Le Parc », ce projet de 600 mètres de long est porté par le paysagiste Michel Desvigne. Le vieux quartier d’affaires traverse actuellement des turbulences, mais il doit désormais embrasser la modernité écologique. L’Association des utilisateurs de La Défense a ainsi mandaté le cabinet Deloitte pour émettre des préconisations quant à l’avenir du secteur. Il s’agira de faciliter le redéveloppement des tours vieillissantes, d’encourager leur mixité et de convertir certains bureaux en lieux d’enseignement, en appartements ou en hôtels.

La Défense prévoit également de construire 5 000 logements pour étudiants et jeunes actifs afin de renforcer son statut de campus d’innovation, destiné à former les élites de demain, futurs acteurs de la grande Histoire. Quant à la Voie Royale de Le Nôtre, elle continue son chemin vers Saint-Germain-en-Laye, et — pourquoi pas — jusqu’à la mer, vers un horizon où tout reste à écrire.

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