Horlogerie
La nouvelle montre Code 11.59 dévoilée par la manufacture Audemars Piguet déchaîne déjà les passions. Et suscite nombre de commentaires. Sera‑t‑elle un succès ? Connaîtra‑t‑elle la même réussite que la Royal Oak, le modèle iconique de la marque ? Nous, on y croit, elle est magnifique !
« Nous n’avons tué personne, nous avons seulement créé une montre. » En janvier dernier, alors que la marque suisse Audemars Piguet venait tout juste de dévoiler, à Genève, sa nouvelle collection, un torrent de commentaires parfois violents s’est abattu sur la tête de son CEO, François-Henry Bennahmias. Des critiques diffusées quasi exclusivement sur les réseaux sociaux, allant jusqu’à réclamer sa démission (incroyable !). Pourquoi tant de haine, quand il ne s’agit, effectivement, que d’une montre, simplement destinée à indiquer l’heure ?
La salve a quelque peu surpris l’intéressé, mais l’homme a le cuir épais et une verve lui permettant de répondre à ses détracteurs. Selon lui, ces réactions épidermiques, provenant essentiellement d’amateurs d’horlogerie n’ayant vu la fameuse montre qu’en photo, ont pour origine le statut d’icône accordée à un produit historique de la marque, la Royal Oak, née en 1972. « A l’opposé des premières critiques “virtuelles”, ceux qui ont tenu la montre en main et ont pu l’observer de près l’ont vraiment appréciée », assure François-Henry Bennahmias.
Dernière minute avant l’heure
A quoi ressemble celle par qui le buzz arrive ? Première différence avec sa sœur aînée Royal Oak au mythique boîtier octogonal, la nouvelle venue est tout simplement ronde. Tout du moins en apparence, car les designers sont parvenus à créer des angles sur les côtés, tissant ainsi un lien avec le style de la maison. Le changement dans la continuité, en quelque sorte, ce qui aurait dû rassurer les puristes au lieu de les hérisser. Cette évolution, Audemars Piguet la revendique jusque dans le nom choisi pour sa collection : Code 11.59. « 11 h 59, la dernière minute avant un jour nouveau », décrypte celui qui préside aux destinées de la maison depuis 2012.
Dates clés
• 1875 : fondation de la marque, en Suisse, par Jules‑Louis Audemars et Edward‑Auguste Piguet.
• 1899 : fabrication de l’Universelle, montre ultracompliquée réunissant calendrier perpétuel, répétition minutes, grande et petite sonnerie, réveil, chronographe à rattrapante, compteur 1/5 de seconde, seconde morte.
• 1919 : arrivée à la tête de la manufacture de la 2e génération, Paul‑Louis Audemars et Paul‑Edward Piguet.
• 1921 : lancement de la montre de poche la plus fine au monde (1,32 mm).
• 1972 : lancement de la Royal Oak.
• 1986 : 1re montre‑bracelet à tourbillon automatique.
• 1992 : Jasmine Audemars devient présidente du conseil d’administration.
• 1993 : lancement de la collection Royal Oak Offshore.
• 1995 : lancement de la collection Millenary au boîtier ovale.
• 2019 : lancement de la collection Code 11.59.
Ce jour nouveau prend donc le visage d’une montre de ville, au look moins estampillé sport que la Royal Oak. Une façon d’élargir la gamme et de séduire de nouveaux clients. Cette ambition se retrouve d’ailleurs dans l’étendue de la gamme Code 11.59, qui accueille d’emblée six modèles : une version trois-aiguilles, un chronographe, un quantième perpétuel et un tourbillon volant, tous équipés d’un mouvement automatique, auxquels s’ajoutent un tourbillon squelette et une répétition minutes, animés cette fois par un mouvement à remontage manuel. Six montres proposées en or blanc ou rose. Davantage qu’une simple nouveauté destinée à faire du bruit, c’est donc bien une collection tout entière qui a vu le jour.
Un boîtier incopiable
Tout a commencé par le projet de concevoir deux mouvements inédits, classique et chronographe – un travail de très longue haleine. Alors que la phase recherche et développement s’achevait, fin 2016, il a été décidé non pas d’intégrer ces nouveaux mécanismes dans des boîtiers existants, mais de créer une ligne inédite. Pour François-Henry Bennahmias, il n’était pas question de s’inspirer de recettes passées, mais bien d’innover. Dans le cahier des charges figurait le désir de conférer à la montre un éclat particulier, passant par une combinaison de finitions brossées et polies.
« Mais cette alternance était impossible à obtenir sur un cercle », souligne-t-il, expliquant ainsi le choix d’associer une lunette ronde et une carrure octogonale. Quant au dessin des brancards (les pièces permettant de tenir le bracelet), il a été imposé par les contraintes d’emboîtage du mouvement : uniquement fixés en partie haute, juste sous la lunette, ils ne sont pas reliés au boîtier en partie basse, conservant un espace de 50 microns. « Cette solution présente l’avantage de rendre la montre incopiable tant sa fabrication est complexe », confie-t-on chez Audemars Piguet. En tout cas, avec la mise sur le marché cette année des 2 000 premiers exemplaires de la Code 11.59, on pourra bientôt juger de l’accueil des clients… The Good Life pressent que cela va marcher.