×
Athinagoras Kostakos
Athinagoras Kostakos
tgljulien

The Good Business

Athinagoras Kostakos, le chef des Cyclades

The Good Business

Savoureuse, ludique et créative… En sept années, la cuisine du très jeune chef de l’hôtel Bill & Coo, à Mykonos, s’est imposée comme l’une des meilleures de Grèce. Parcours sans fautes.

A peine arrivés, alors qu’ils sont confortablement installés dans un canapé face à la piscine et à la mer, un amuse-bouche est offert aux clients de l’hôtel : un mini-sandwich croustillant à la sardine marinée, accompagné d’un gaspacho de salade grecque que l’on boit à même une petite fiole. Rafraîchissante, savoureuse, ludique, cette petite ­attention donne le ton du Bill & Coo, l’un des hôtels les plus chic et les plus trendy de Mykonos. Sa marque de distinction ? Son restaurant, où officie, quasiment depuis la création de l’hôtel en 2007, l’un des jeunes chefs les plus prometteurs de Grèce : Athinagoras Kostakos, 31 ans cet été, qui a reçu sa première toque d’or l’an dernier – l’équivalent, en Grèce, des étoiles du guide Michelin. Sa carrure imposante et son visage doux orné d’une barbe parfaitement taillée lui donnent un air bonhomme, jusqu’à ce qu’il se mette à parler de cuisine : tout son être s’enflamme, animé par la passion. Un « Apprenti Cuisinier », tatoué en français sur son bras, rappelle qu’il est passé par la case Paris durant sa formation.

Les saveurs des Cyclades revisitées
Athinagoras Kostakos a grandi dans les cuisines des rôtisseries typiquement grecques de son père. A 15 ans et demi, il annonce à sa ­famille qu’il veut devenir chef cuisinier. Réticent, son père refuse de lui payer des études tant qu’il ne s’est pas frotté à la réalité du métier : il l’envoie s’essayer comme marmiton dans un restaurant chic de la ­Riviera athénienne. Au bout d’un an et demi à éplucher des légumes, le jeune Athinagoras est sûr de vouloir passer sa vie derrière les fourneaux, ébloui par le potentiel créatif du métier. De 17 à 20 ans, le voilà en France, entre formations accélérées à l’école du Ritz Escoffier et à celle d’Alain Ducasse, et le travail en alternance dans des restaurants étoilés comme L’Espadon, le restaurant du Ritz. De retour en Grèce, il fait la connaissance de Theodosis Kakoutis. Le jeune Mykoniate vient d’ouvrir le Bill & Coo et invite Athinagoras à passer des vacances sur son île. L’alchimie entre les deux hommes opère rapidement, et Athinagoras se retrouve à la tête du restaurant de l’hôtel, avec une ambition : se démarquer de ce qui se fait à Mykonos. Sur l’île festive et jet-set, règne alors une cuisine impersonnelle ou internationale où priment sushis et recettes italiennes. Revisitant la cuisine des Cyclades avec les techniques modernes qu’il a apprises à Paris, Athinagoras s’éprend des produits locaux. Un garçon pêche tous les jours pour lui algues et oursins, tandis qu’un autre court la garrigue pour lui rapporter des herbes pleines de saveurs – thym, marjolaine, origan… Sa philosophie : que les ­légumes, la viande et les fromages viennent d’un rayon de moins de 50 kilomètres du restaurant, et en particulier de Naxos, la grande île agricole de ­l’archipel. « La base d’un bon plat, ce n’est ni moi, ni ma technique, mais le produit, souligne le chef. Par exemple, mes Cherry Tomatoes se résument aux tomates cerises de Santorin, aux câpres et au fromage de ­chèvre frais de Mykonos. C’est simple et magnifique ! » s’exclame-t-il. La réalité est plus subtile : les tomates cerises sont pochées dans le miel de Syros, les câpres sont réduites en crème, le fromage de chèvre transformé en glace, le tout étant couronné d’une mousse aérienne au thym. Les contrastes entre le chaud et le froid, la douceur et l’acidité, les arômes et les textures en font une entrée tout simplement sublime. Tout comme l’est le cabillaud à la sauce œuf et citron : cuit sous vide, le poisson est accompagné d’un rouleau de laitue de mer farci au riz noir parfumé aux écrevisses et aux fruits de mer.

Ambassadeur d’une nouvelle cuisine grecque
Si toute sa carrière s’est déroulée jusqu’à présent dans l’hôtellerie, Athinagoras le vit comme une liberté : « Le chiffre d’affaires de l’hôtel reposant sur ses chambres, j’ai beaucoup de moyens : acheter les meilleurs produits, consacrer du temps à la création, faire évoluer ma cuisine ; mais aussi, chaque soir, un service limité à 45 couverts, afin de garder le contrôle sur la qualité. » Le secret d’un bon restaurant se résume, selon lui, à une bonne table et à une bonne atmosphère. Très soudée et travaillant dur, sa brigade de dix personnes est pour lui comme une famille. L’été, il n’a pas le temps de profiter de l’île. L’hiver, il voyage, crée des restaurants pop-up et, depuis peu, enseigne : il vient d’être recruté par l’école d’Alain Ducasse pour transmettre le savoir de la nouvelle cuisine en Grèce et dans les Balkans. Un chef qu’il va falloir suivre… de très près !

Voir plus d’articles sur le sujet
Continuer la lecture