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Athènes, de la transition à la renaissance
L’Acropole et son imposant Parthénon dominent Athènes, une métropole cernée par la mer et les montagnes. L’agglomération comporte une trentaine de municipalités dans lesquelles vivent plus de 3 millions d’habitants.
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The Good Business

Athènes, de la transition à la renaissance

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Profondément marquée par la crise économique qui touche la Grèce depuis 2009, Athènes se transforme à grande vitesse. Manque de moyens oblige, c’est la créativité et une volonté, nouvelle, de mutualiser les efforts et les moyens qui en font aujourd’hui l’une des capitales les plus bouillonnantes d’Europe.

En chiffres

  • Selon le dernier recensement grec, en 2011, la municipalité d’Athènes compte seulement 664 046 habitants. Elle fait cependant partie d’une agglomération beaucoup plus grande, forte de plus de 3 M d’habitants. La région de l’Attique, qui s’étend jusqu’au cap Sounion, abrite quant à elle 3,8 M d’habitants.
  • L’espérance de vie des Athéniens est de 78,45 ans pour les hommes et de 83,51 ans pour les femmes.
  • Le taux de fertilité est de 1,3 enfant par femme.
  • A Athènes, en 2014, les dépenses mensuelles moyennes des foyers ont été de 1 460 €.
  • En 2015, le taux de chômage, à Athènes, a été de 25,2 %, contre un taux national de 24,9 %.
  • Paradoxalement, le PIB par tête s’établissait en 2013 (derniers chiffres disponibles) à 30 933 € contre 16 451 € à l’échelle nationale.
  • En 2013, la région Attique a généré la majeure partie (86,6 Mds €) du PIB grec de 180,3 Mds €. Athènes Centre a contribué à hauteur de 31 Mds €. Par comparaison, Thessalonique, la deuxième ville du pays, a contribué au PIB en 2013 à hauteur de 15,6 Mds €.
  • Athènes compte 226 hôtels, 14 700 chambres et 27 000 lits.
  • Le musée de l’Acropole, inauguré en 2009, est vite devenu le premier musée d’Athènes en termes de fréquentation. Il a reçu plus de 1,46 M de visiteurs de juin 2014 à mai 2015.

Citer l’Allemagne du début des années 30 pour décrire sa ville, il fallait oser. Le maire d’Athènes, Georges Kaminis, n’hésite pourtant pas. « La similarité est flagrante, estime-t-il. Une crise économique forte qu’on ne peut ignorer, mais qui entraîne un bouleversement total de la société et libère une créativité sans précédent. » Élargir l’horizon, changer d’imaginaire, forcer les traditions et les habitudes… La crise économique qui touche la Grèce depuis 2009 bouleverse les équilibres à travers tout le pays et particulièrement dans sa capitale. Les indicateurs économiques sont sévères. Près de 25 % de la population active est au chômage, le pouvoir d’achat a diminué de plus de 30 % en six ans, le produit intérieur brut (PIB) du pays est passé de 237 milliards d’euros en 2009 à 176 milliards en 2015. Des centaines de milliers d’entreprises ont mis la clé sous la porte. Et pourtant, il y a comme de la résilience dans l’air athénien. Une énergie singulière. « La crise nous a réveillés et a transformé Athènes en une ville vivante et passionnante où le désir est libre », souligne joliment Aphrodite Panayotakou, vice-présidente du centre culturel Onassis et présidente de la communication de la puissante fondation Aristote Onassis.

Entre 1981, date de son adhésion à la CEE, et 2009, la Grèce a connu un développement économique continu, encore accéléré par son entrée dans la zone euro, le 1er janvier 2001. L’État peut alors emprunter au même taux que l’Allemagne ou la France et ne s’en prive pas. C’est l’époque à laquelle le déficit public se creuse et où la dette explose, sans que personne, ni en Europe ni dans les gouvernements qui se succèdent, ne tire la sonnette d’alarme. Les banques aussi se refinancent aisément sur le marché interbancaire et proposent aux particuliers un accès facile à l’emprunt. Les Grecs se précipitent notamment sur le marché immobilier, qui connaît un essor massif. L’exode rural enclenché après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et qui soutient le marché de la construction, a particulièrement profité à Athènes, qui concentre dans son agglomération élargie – une trentaine de municipalités – plus de trois millions d’habitants. Soit plus de 27 % de la population grecque totale (environ 11 millions d’habitants selon le dernier recensement de 2011). Parce qu’elle a poussé trop vite et sans plan d’urbanisme, c’est une ville chaotique et bétonnée qui peut rebuter au premier abord.

Ville maritime
Pour la tenue des jeux Olympiques de 2004, la capitale se métamorphose à coups de grands travaux, avec des investissements de plus de 9 milliards d’euros. La grande majorité des installations sportives construites pour l’occasion (stade flambant neuf, piscine olympique, parcours de kayak, etc.) n’ont pas trouvé de repreneur après les Jeux. Une reconversion ratée et un profond sentiment de gâchis. Ces grands bâtiments que les Grecs appellent les « éléphants blancs », aujourd’hui rouillés ou envahis d’herbes folles, symbolisent cette folie des grandeurs qui a partiellement marqué les années 2000 en Grèce. Côté infrastructures, le bilan est bien meilleur. Un nouvel aéroport ultramoderne et des périphériques qui décongestionnent la ville voient le jour pour les Jeux. Un tram relie le centre au bord de mer, en partie réaménagé en une longue promenade qui rappelle qu’Athènes est aussi une ville maritime. Ce qu’on a tendance à oublier, à trop concentrer ses visites dans le centre historique. L’unification des sites archéologiques, commencée en 1983, s’achève enfin. La « grande promenade », comme on l’appelle désormais, permet de relier, dans un environnement piétonnier, la porte d’Hadrien au cimetière antique du Céramique, en passant par la colline de l’Acropole ou la sereine Agora. Un poumon vert en plein cœur de la ville. Un parcours certes incontournable pour les touristes, mais aussi très prisé des Athéniens eux-mêmes, qui s’y rendent volontiers, le dimanche, en famille.

Les jeux Olympiques de 2004 ont permis d’améliorer les infrastructures et les transports. Métro, tramways et bus sillonnent la ville jusqu’à la mer.
Les jeux Olympiques de 2004 ont permis d’améliorer les infrastructures et les transports. Métro, tramways et bus sillonnent la ville jusqu’à la mer. Laurent Fabre

L’aéroport d’Athènes décolle

Athènes, de la transition à la renaissance

L’aéroport international d’Athènes Elefthérios-Venizélos vient de fêter ses quinze ans. Construit en 2001, à 30 km du centre d’Athènes, il a remplacé l’ancien aéroport d’Hellinikon, arrivé à saturation parce qu’il était situé au cœur de la ville. Pour sa construction, un partenariat privé-public a été mis en place avec le géant allemand du bâtiment, Hochtief. Dès son inauguration, l’aéroport a été salué pour sa modernité et son efficacité. En quinze ans, il a accueilli près de 220 millions de passagers, moitié grecs, moitié étrangers. En raison de la crise, le trafic s’est tassé pendant six années. Mais, depuis 2013, les résultats de l’aéroport ont décollé de manière spectaculaire : le trafic passager a augmenté de plus de 20 % par an, passant de 12,5 à 18,1 millions de passagers aujourd’hui. En octobre dernier, Yiannis Paraschis, directeur général de l’aéroport d’Athènes, a reçu le prix Airport Chief Executive of the Year, délivré par le centre CAPA pour l’aviation. Sa stratégie, son sens de l’innovation et sa gestion ont été récompensés. Un exemple de la résilience des Grecs, capables de rebondir dans la crise.

De 2004 à 2008, Athènes vit son âge d’or. « 2008 a même été la meilleure année dans l’histoire de la ville en nombre de visiteurs », rappelle Yiannis Retsos, président de la Fédération grecque des hôteliers et vice-président du SETE, la confédération des professionnels du tourisme en Grèce. Et puis, c’est le coup d’arrêt. Fin 2009, dans la foulée de la crise financière mondiale de 2008, la Grèce révèle que son déficit atteint près de 13 % du PIB et que sa dette publique dépasse les 127 % du PIB. Très loin des statistiques attendues par l’Europe, qui accuse alors les Grecs d’avoir triché pour dissimuler l’ampleur de leurs difficultés financières. Le spectre de la faillite plonge le pays tout entier dans une crise qui semble ne jamais devoir s’arrêter. Athènes paie le prix fort. Entre 2008 et 2012, elle perd 50 % de ses revenus liés au tourisme « Les images des grosses manifestations et de leurs débordements dans les années 2011-2012 ont littéralement fait fuir les visiteurs, se désole le maire. Or, l’économie de la ville repose avant tout sur la bonne santé du tourisme. » Inquiets, les acteurs du secteur, tant publics que privés, réagissent : pour la première fois, ils se mettent sérieusement autour de la table pour réfléchir à une stratégie marketing commune.

Destination tendance
La mairie lance, en 2013, le Travel Trade Athens, un salon destiné aux professionnels du tourisme pour qu’ils puissent mieux connaître la ville et acheter ses produits. « Pendant deux jours, nous invitons, à nos frais, des acheteurs de produits touristiques du monde entier. Nous les assistons dans la découverte de la ville, nous organisons des meetings en B to B avec les acteurs locaux du secteur. Les plus gros acheteurs viennent d’Europe : Allemagne, Royaume-Uni, France », explique Alexis Galinos, le directeur de l’EATA, l’agence de développement d’Athènes. Le prochain rendez-vous est fixé en octobre 2016. Objectif : montrer que la ville est sûre et amicale, bon marché – les prix dans l’hôtellerie sont encore inférieurs de 40 % à ceux de 2008 –, mais aussi pleine de ressources, en témoigne l’ouverture de nouveaux hôtels, de restaurants et de bars pointus. Grâce à cet effort concerté, la situation se stabilise dès 2013. La Grèce devient même une destination tendance dès l’année suivante, avec plus de 22 millions de visiteurs. Le secteur du tourisme représente cette année-là 17,3 % du PIB. « A Athènes, nous avons comptabilisé 26 % de visiteurs étrangers de plus en 2015 par rapport à 2014 », se félicite le maire. La municipalité d’Athènes en elle-même est assez petite (664 000 habitants) et cernée par des barrières naturelles – des montagnes au nord, à l’ouest et à l’est, et la mer au sud – qui limitent son expansion. Principale piste de développement aujourd’hui : les 70 km de côtes jusqu’au merveilleux temple de Poséidon, au cap Sounion, dans l’extrême sud de l’Attique. De Faliro à Varkiza, une petite dizaine de marinas hébergent des yachts du monde entier. C’est aussi, l’été, la destination privilégiée de la jeunesse dorée, qui se rue sur cette succession de plages. La mer y est cristalline et le potentiel de croissance, énorme. Les investisseurs étrangers l’ont bien compris et convoitent les actifs publics privatisables de cette Riviera.

Dans le sud d’Athènes, la marina de Vouliagmeni fait partie d’un luxueux complexe hôtelier.
Dans le sud d’Athènes, la marina de Vouliagmeni fait partie d’un luxueux complexe hôtelier. Laurent Fabre

Le 3 janvier 2016, Jermyn Street Real Estate, un fonds représentant des investisseurs originaires de Turquie, d’Abou Dhabi, de Dubaï et du Koweït, a acheté pour 400 millions d’euros le luxueux complexe de l’Astir Palace, situé à Vouliagmeni. Trois hôtels, un spa, des restaurants, une marina, des plages privées et une colline entièrement vierge où le fonds projette de construire des villas privatives. Plusieurs autres hôtels sont à vendre dans la zone, mais le projet le plus attractif reste l’exploitation de l’ancien aéroport d’Athènes, celui d’Hellinikon. Une surface de 620 hectares et une marina trois fois plus grande que celle de Monaco. En 2015, un groupe d’investisseurs, composé de Lamda Development (propriété du magnat grec Spiros Latsis), du fonds chinois Fosun et d’Eagle Hills d’Abou Dhabi, a remporté l’appel d’offres en proposant 915 millions d’euros au fonds de privatisation grec, le Taiped. Depuis, le processus a été gelé, plusieurs acteurs locaux contestant ce qu’ils dénoncent comme une braderie, car le site a été estimé à plus de 1,5 milliard d’euros par des experts indépendants.

Marché attractif
Plus à l’ouest, c’est toute la zone du Pirée qui aiguise les appétits. Notamment chinois. Le 8 avril 2016, la Grèce a cédé, pour 368,5 millions d’euros, 67 % de l’Organisation du port du Pirée (OLP) au géant China Ocean Shipping Company (Cosco). Cette compagnie chinoise était déjà présente dans le port du Pirée depuis 2008, puisqu’elle y exploitait déjà deux terminaux de conteneurs. Avec l’acquisition de deux nouveaux terminaux, l’idée est de faire du Pirée le plus grand centre de transit du sud-est de l’Europe, un pont entre l’Asie et l’Europe. Pour Konstantinos Bitsios, vice-président exécutif de la SEV, fédération hellénique des entreprises, l’arrivée des Chinois est une bonne chose. « Leur présence est essentielle, car ils veulent faire du port un hub logistique en Méditerranée, affirme-t-il. Pour cela, obtenir la gestion des terminaux de conteneurs était un premier pas, mais ils veulent aussi développer le rail. C’est toute la chaîne logistique grecque qui peut bénéficier à terme de leurs activités, une source importante d’emplois pour le Grand Athènes. » Ce Grand Athènes, qui s’étend d’Agios Stephanos, au nord, jusqu’au Pirée, à l’ouest, et à Varkiza, au sud, est la première zone économique et le principal bassin d’emplois du pays. Toutes les grosses industries y ont leur siège social. Car l’administration restant très centralisée, il faut être près des ministères. « Je suis très optimiste pour le développement d’Athènes, précise Konstantinos Bitsios. Le marché athénien est attractif : le coût du travail a beaucoup baissé ces cinq dernières années – entre 20 et 30 % de baisse des salaires entre 2009 et 2015 –, les jeunes sont très bien formés, l’immobilier est très bon marché… il y a des opportunités. » La SEV reçoit beaucoup de demandes d’informations d’investisseurs étrangers intéressés par les services, la logistique ou le secteur pharmaceutique. « Et puis, il y a un buzz autour des start-up, qu’il nous faut soutenir », ajoute l’industriel. Cet écosystème reste, en volume, assez peu développé, avec seulement 14 incubateurs disséminés dans le centre d’Athènes et environ 350 start-up. Beaucoup de celles-ci œuvrent dans les nouvelles technologies, les applications mobiles, mais aussi désormais dans le secteur du tourisme ou de l’agroalimentaire. Une dizaine ont déjà réussi leur transition et sont devenues des entreprises rentables. « Workable, TaxiBeat, Locish, CareAcross ou Incrediblue ont attiré des capitaux importants en 2015 et sont de vraies success-stories, rapporte Socrate Ploussos, président de l’Association grecque des start-up. Aujourd’hui, les idées ne manquent pas, mais le marché a surtout besoin de liquidités. »

La Grèce a vendu, en avril dernier, la gestion du port du Pirée à un armateur chinois, Cosco. Le gouvernement et les investisseurs ambitionnent d’en faire le plus grand centre de transit du sud-est de l’Europe.
La Grèce a vendu, en avril dernier, la gestion du port du Pirée à un armateur chinois, Cosco. Le gouvernement et les investisseurs ambitionnent d’en faire le plus grand centre de transit du sud-est de l’Europe. Laurent Fabre

Durant trois ans, près de 50 millions d’euros ont été injectés via les fonds Jeremie, des subventions européennes allouées exclusivement à la promotion de start-up. « Le programme a cessé fin 2015 et on attend toujours de savoir quelle sera l’enveloppe des prochains fonds alloués à l’entrepreneuriat », souligne Socrate Ploussos, par ailleurs à la tête d’Open Circle, un fonds d’actions qui met en relation start-up et financeurs. L’homme d’affaires s’intéresse notamment à l’e-commerce, qui représente aujourd’hui 2 % du PIB grec. « Le potentiel de croissance est immense et les start-up développant des services de soutien aux e-boutiques sont nécessaires. » Désormais, les investisseurs privés – banques, fonds d’actions ou business angels – commencent lentement à prendre le relais de l’argent européen. Marina Hatsopoulos a fait fortune aux États-Unis en montant Z Corporation, l’une des premières entreprises d’imprimantes 3D, qu’elle a très bien revendue en 2005. « Depuis, j’investis dans les start-up et je suis venue voir ce qui se passait à Athènes… Le potentiel des équipes créatives est en pleine croissance et les ingénieurs sont très bien formés. Il y a du business à faire ici. » Marina Hatsopoulos a déjà investi dans l’entreprise Codebender, inventrice d’une application Internet open source. Le projet a été lancé en 2012 par une bande de copains, étudiants à l’excellente école d’ingénieurs en sciences informatiques de l’université de Patras, dans l’ouest du pays. Le maire veut soutenir cet écosystème dans lequel il voit une « révolution entrepreneuriale capable d’offrir des débouchés à une jeunesse aujourd’hui inquiète. » En janvier 2016, 51,9 % des moins-de-25 ans étaient  encore au chômage en Grèce. En avril 2014, la municipalité a inauguré InnovAthens, un incubateur pour start-up aux services totalement gratuits : espaces de cotravail, tutorat, séminaires. Installé à Technopolis, l’ancienne usine à gaz de la ville transformée en vaste centre artistique, InnovAthens s’inscrit dans un quartier en pleine réhabilitation, autour de la très longue rue Piréos. Plusieurs musées, dont le fameux musée d’art moderne Benaki, et de nombreuses galeries s’y sont installés. « Nous souhaitons créer un hub dédié à la culture et à l’innovation, explique Alexis Galinos de l’EATA. Nous avons, par exemple, mobilisé près de 14 millions d’euros pour rénover, à quelques centaines de mètres du Benaki, une ancienne piscine municipale. Nous gardons la piscine, mais transformons les bâtiments annexes en espaces capables d’accueillir de jeunes entrepreneurs et des projets culturels. »

L’Acropole, un rocher sacré et vivant

Athènes, de la transition à la renaissance

Elle émerge telle une île au-dessus de la ville. Berceau de la démocratie grecque et de la civilisation occidentale, l’Acropole rayonne comme un phare sur Athènes. Un phare qui dégage une formidable énergie. Sa couronne de calcaire sert de piédestal aux temples et aux trésors les plus célèbres du monde grec, à commencer par le Parthénon, joyau de l’humanité aux proportions parfaites. Au sommet, on honorait les dieux ; en bas, dans l’Agora, on traitait des affaires de la ville ; sur les flancs se déroulaient les manifestations culturelles, toujours d’actualité aujourd’hui : au théâtre d’Hérode Atticus, Aristophane, comme les auteurs contemporains, est joué à guichets fermés chaque été, dans le cadre du festival d’Athènes. L’Acropole et son nouveau musée – construit par Bernard Tschumi et inauguré en 2009 – ne sont pas seulement les principaux points d’attraction des touristes étrangers. Depuis que les avenues Apostolou Pavlou et Dionysiou Areopagitou ont été converties il y a une quinzaine d’années en une immense esplanade pavée et arborée, les Athéniens se sont réapproprié le rocher sacré et ses environs.Au pied de l’Acropole et de la colline de Philopappos, il fait bon flâner, parmi les oliviers et le chant des cigales, sur cette voie piétonnière qui relie entre eux sept sites archéologiques majeurs. Les quartiers alentour ont été redynamisés : derrière le musée de l’Acropole, Koukaki est devenu un repaire pour les jeunes, plein de petits commerces, de bars alternatifs et de boutiques de créateurs. Tandis qu’au-delà de Thissio, et de ses grandes terrasses de café, les quartiers de Keramikos et de Gazi se développent.

La piscine Serafio doit ouvrir ses portes fin 2016. Dans le registre des grands travaux, en 2012, un ambitieux projet de refonte totale du centre d’Athènes, appelé Rethink Athens, a été lancé. Objectif : créer une vaste zone piétonnière, verte et accessible aux vélos autour de l’artère Panepistimiou. Coût estimé de l’opération : 92 millions d’euros. Le 27 février 2013, le cabinet néerlandais Okra remporte la compétition internationale d’architecture financée par la fondation Aristote Onassis, mais, faute de moyens, le projet est abandonné. Aujourd’hui, le maire voit moins grand et s’attelle à la réhabilitation du triangle commercial situé entre les trois principales places de la ville, Syntagma, Omonia et Monastiraki. Avec l’essor des banlieues résidentielles au nord et au sud de la ville, tout au long des années 80, 90 et 2000, le centre d’Athènes a été délaissé. « Et même partiellement abandonné, au plus fort de la crise, en 2012, se désole Ilias Vlachakis, chef de ce projet. Il s’agit de reconquérir du territoire et de changer la façon dont les Athéniens voient leur espace public. » Déjà une  cinquantaine de bars et de restaurants branchés ont ouvert autour du vibrant square Agia Irini, au cœur de ce triangle commercial, devenu en moins de deux ans l’un des endroits les plus branchés d’Athènes.

Douceur de vivre
Quelques blocs plus haut, la rue Voukourestiou, qui concentre les boutiques de luxe, connaît, elle aussi, un renouveau aussi surprenant que rapide. Et cela depuis que les frères Panas, des promoteurs spécialisés dans la restauration et le divertissement, ont repris en main, en 2015, trois établissements phares du quartier, dont le Zonar’s, un café-bistrot historique du centre, ouvert en 1940, et qui a longtemps vu passer les élites culturelles et politiques avant de tomber un peu en désuétude ces dernières années. « Nous avons tout de suite compris le potentiel de ce quartier, explique Chrysanthos Panas. Autour du Zonar’s, il y a une dizaine de théâtres, des librairies, de la haute joaillerie, le Parlement, les cabinets d’avocats de Kolonáki, des universités, deux stations de métro… C’est un lieu de passage obligé. Notre mission : en faire une destination prisée en investissant dans la qualité et le raffinement. » L’attachement des Athéniens à leur ville est viscéral… et contagieux. « Où ailleurs trouvez-vous cette lumière ? Cette douceur de vivre ? Cette énergie ? Tout ici est à échelle humaine et doit le rester. Il faut voir au-delà du béton », estime Aphrodite Panayotakou, de la fondation Onassis. Le maire rêve, lui, de laisser à l’issue de son mandat « une ville cosmopolite, rénovée, à l’offre culturelle riche, et ouverte sur le monde ». Avec les moyens qui sont les siens, Athènes se réinvente, se modernise et se tourne vers l’extérieur, voulant laisser derrière elle les tentations de repli qui ont marqué les années de crise. Ce n’est pas gagné, d’autant que, jusqu’à preuve du contraire, ni Athènes ni la Grèce ne sont réellement sorties de la crise…

Le boom de l’hôtellerie

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C’est une petite rue typique d’Athènes, au charme un peu chaotique, avec ses trottoirs pas forcément droits, ses immeubles sous bâche depuis des années, ses voitures garées n’importe où. La rue Mitropoleos attire pourtant les principaux investissements hôteliers de la ville. Il faut dire que, reliant les places Syntagma à Monastiraki, la rue est absolument stratégique sur la carte du tourisme, qui s’est resserrée ces dernières années autour de l’Acropole. Ce quartier en lisière de Plaka est d’ailleurs en pleine effervescence depuis quelques années, avec l’ouverture de nombreux bars à vins, de restaurants exotiques ou branchés, de boutiques de créateurs et, surtout, du New Hotel en 2011, boutique-hôtel arty du collectionneur d’art contemporain Dakis Joannou. En 2016, pas moins de trois hôtels haut de gamme verront le jour dans la rue Mitropoleos qui, jusqu’à présent, ne comptait que de petites adresses sans prétention. Déjà implanté dans le quartier, le groupe Electra a métamorphosé l’ancien ministère de l’Éducation nationale en un 5-étoiles de 223 chambres et suites qui sera inauguré cet été. Le boutique-hôtel O&B, très chic et design, situé du côté de Thissio, vient d’ouvrir une antenne, le Met34, en face de la cathédrale Mitropoli. Plus bas, le groupe Daskalantonakis-Grecotel, qui possède 26 hôtels de luxe dans toute la Grèce, a repris la célèbre maison classée Chitiroglou, dans laquelle on vendait autrefois des tissus. Juste en face, des investisseurs saoudiens auraient restauré un grand immeuble néoclassique pour en faire des appartements à louer. Si on élargit au centre d’Athènes, une
douzaine de nouveaux hôtels auront ouvert leurs portes entre 2015 et 2017.

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