Culture
Aux quatre coins de la planète, ces nouvelles expositions interrogent plus que jamais notre rapport au monde.
Turin
Surréaliste
La première exposition de Magali Reus en Italie est à ne pas manquer, avant de voir son prochain solo show au Stedelijk Museum (Amsterdam). Cette jeune Néerlandaise vivant à Londres (où elle est représentée par la galerie The Approach) a reçu le prix de Rome, récompense la plus fameuse des Pays-Bas pour un artiste émergent. Strapontins abandonnés, frigos éventrés, cadenas surdimensionnés… ses installations de sculptures ressemblent à s’y méprendre à de vrais pièces de mobilier et matériaux industriels. N’y cherchez pourtant pas de ready-made post-duchampien : chaque objet est produit par l’artiste dans une facture rutilante et mis en scène à la manière d’un site de fouilles archéologiques mettant à nu les entrailles de ces biens d’usage. En reproduisant des éléments familiers dans une forme plastique inattendue, l’artiste devient une passionnante ethnographe.
Magali Reus, Fondazione Sandretto Re Rebaudengo, jusqu’au 12 juin. www.fsrr.org
Anvers
Sans prescription
Luc Tuymans est la star incontestée des peintres belges. Des images de son iPhone à celles de l’actualité, rien ne semble échapper à son regard. Après sa récente condamnation pour l’adaptation sans accord d’une photographie d’un politicien outre-Quiévrain et son utopie d’une Documenta [exposition mondiale d’art qui se tient tous les cinq ans à Cassel en Allemagne, NDLR] à Bruxelles, l’Anversois fait une pause dans sa ville. Des méchants nazis au gentil roi Baudouin, sa sélection de portraits d’anonymes et de personnalités à lunettes – les « trois quarts de mon œuvre », précise-t-il – nous invite à ne pas nous fier aux apparences… Au même moment, ses galeristes David Zwirner (New York, du 5 mai au 25 juin) et Zeno X (Anvers, du 7 septembre au 22 octobre) l’exposent aussi.
Luc Tuymans : Glasses, Museum aan de Stroom (MAS), du 13 mai au 18 septembre. www.mas.be
Milan
Expérimental
Carsten Höller nous avait laissés bouche bée avec sa chambre d’hôtel éphémère au centre d’art viennois TBA21. Le revoilà dans la fondation privée des anciennes usines du fabricant de pneus Pirelli. Aux commandes : Vicente Todoli, ex-directeur
de la Tate Modern, qui avait invité ce Belge de naissance et Suédois d’adoption à concevoir une installation monumentale à la Turbine Hall de l’institution londonienne : ce furent cinq toboggans ! Ses nouvelles attractions milanaises « coupées en deux » – le visiteur devra retenir ce qu’il aura vu de la première partie avant de plonger dans la suivante – forment un labyrinthe en vase clos dans lequel l’homme recherche un sens à donner à sa vie. On n’en attendait pas moins de cet entomologiste reconverti en artiste.
Carsten Höller : Doubt, Hangar Bicocca, jusqu’au 31 juillet. www.hangarbicocca.org
Bordeaux
Femme à l’œuvre
Qui est Judy Chicago ? Une artiste américaine qui met le sexe féminin au centre de l’attention d’un monde dominé par les hommes. Depuis la fin des années 60, son œuvre plastique et performative est de facto trop étroitement assignée à son statut d’icône de « l’art féministe », à l’image de sa gigantesque table triangulaire dressée d’assiettes en céramique et textile en forme de vulves : The Dinner Party (1979-1981). Le musée d’art contemporain de Bordeaux remet le couvert avec d’autres services créés d’après des figures féminines historiques et mythologiques et des affiches de ses expositions qui électrisent son propos bien au-delà de son psychédélisme aguicheur.
Why Not Judy Chicago ?, jusqu’au 4 septembre. www.capc-bordeaux.fr
Kingston
Space Caribbean est le tout premier espace d’art contemporain des Caraïbes, situé dans la maison de Perry Henzell – auteur de The Harder They Come avec le chanteur de reggae Jimmy Cliff, en 1972 –, rénovée par l’architecte afro-britannique David Adjaye grâce à la famille de ce réalisateur jamaïcain et à une expe
rte en art londonienne également native du pays. Pour son lancement, le nouveau centre culturel rend hommage à l’œuvre doublement picturale et sociale de Jean-Michel Basquiat (1960-1988). I Feel Like a Citizen est un cri d’amour au peintre afro-américain et fils d’émigrés issus de la diaspora des ces îles des Antilles laissées pour compte et de l’Amérique du Nord.