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Architecture d’intérieur : Festen, l’essence du bâtiment

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Couple à la ville comme sur les chantiers, les architectes d’intérieur Hugo Sauzay et Charlotte de Tonnac (Festen) œuvrent depuis dix ans pour des projets inscrits dans leur contexte et dans leur temps… Une méthode qu’ils défendent à l’hôtel Château Voltaire, qui a ouvert ses portes à Paris à l’été 2021.

Si l’époque des starchitectes semble (presque) révolue, une nouvelle façon d’appréhender la création, plus modeste, plus contextuelle, infuse également l’architecture d’intérieur depuis quelques années. Charlotte de Tonnac est très claire sur le sujet. « Notre travail doit être juste et subtil, car nous sommes un simple trait d’union, un lien entre le passé et le futur. Ceux qui viendront après nous devront pouvoir enlever très simplement ce qu’on a installé », défend-elle. Loin du démiurge, le duo Festen revisite le passé dans des hôtels, appartements, résidences secondaires et boutiques de manière décomplexée et très actuelle.

« Nous ne sommes pas systématiquement dans l’innovation et nous n’avons pas spécialement envie de marquer esthétiquement notre temps, nous n’avons pas peur de faire appel aux anciens codes pour créer », précise sans fard Hugo Sauzay. Un travail de création sensible et contextuel qui attire aujourd’hui les clients les plus exigeants : Valéry Grego, fondateur des hôtels Pigalle, à Paris, et des Roches rouges, à Saint-Raphaël, Thierry Gillier, le patron de Zadig & Voltaire, le groupe hôtelier Belmond, propriété de LVMH, pour le Splendido Mare, à Portofino, ou Hennessy pour des bureaux…

L’hôtel Château Voltaire, à Paris.
L’hôtel Château Voltaire, à Paris. Francois Halard

Magnifier les espaces d’origine

« Le travail du contexte nous importe plus que jamais, nos projets les plus réussis, en tout cas ceux que nous préférons, sont ceux où nous avons pris le temps de comprendre l’essence d’un bâtiment, d’une époque, d’un quartier… Par exemple, nous avons inscrit notre projet de l’hôtel Les Roches rouges, à Saint-Raphaël, dans son architecture radicale. Nous avons détruit les ajouts successifs des décennies précédentes pour retrouver le côté années 50 d’origine. »

Pour ses chantiers, l’agence en arrive souvent à toucher les structures, par exemple dans le nouvel hôtel Château Voltaire, dans le 1er arrondissement de Paris, dans un ensemble d’édifices des XVIIIe et XIXe siècles, Festen réinsuffle les codes de l’époque sur la façade et retrouve l’essence du bâtiment.

« Les contraintes dessinent nos projets », résume Hugo Sauzay. C’est aussi le cas à Mexico, où le duo rénove un bâtiment ancien avec moulures et cinq mètres de hauteur sous plafond pour le groupe hôtelier Habita. « J’aime tellement les petits bars de quartier et j’en veux tellement à ceux qui transforment ces rades en endroits beaux, à la mode… et désastreux. D’ailleurs, ils nous arrive parfois de refuser des projets si on ne sent pas les intentions d’un client. Le nombre de fois où on nous a appelés pour faire un Roches rouges bis, en Bretagne ou ailleurs, comme s’il s’agissait d’une franchise… » s’agace-t-il encore.

L’hôtel Le Pigalle, à Paris.
L’hôtel Le Pigalle, à Paris. Benoit Linero

Un autre malentendu concerne le rôle de l’architecte, qui se sent obligé en contrepartie de ses honoraires, de tout redessiner et de ne rien garder. Un penchant partagé par les Festen à leurs débuts. « Désormais, notre légitimité nous permet de conserver l’existant lorsque c’est justifié », explique Hugo Sauzay.

« Au Mexique, nous avons préservé une grande partie de ce qui était là, en l’adaptant aux contraintes d’un hôtel du XXIe siècle, mais nous avons aussi rencontré des artisans locaux, avec lesquels nous travaillons et qui nous aident à mieux nous adapter au contexte », détaille Charlotte de Tonnac. Car le travail de contextualisation implique aussi une attention portée aux matériaux, un pan important du travail de Festen, essentiel à l’heure de l’épuisement des ressources et du questionnement de l’empreinte carbone de la construction.

« Nous sommes en ce moment sur un projet d’une maison à Lanzarote, pour laquelle nous ne travaillons que des matériaux vernaculaires, notamment la chaux. Si nous utilisons souvent ce type de matière première, ce n’est pas par snobisme ou passéisme, mais plutôt parce que c’est du bon sens paysan. Nous ne sommes pas dans la sophistication extrême, nous préférons la matière, la patine, l’imperfection contrôlée. Regardez Notre-Dame de Paris, si elle tient encore debout, c’est parce que ses pierres ont été cimentées à la chaux, qui est très élastique, qui absorbe les chocs et laisse respirer les bâtiments. Si elle avait été construite en béton, tout aurait craqué. Nous rejetons aussi les matériaux composites, qui sont bien souvent des dérivés du pétrole. »

L’hôtel Les Roches rouges, à Saint‑Raphaël, dans le Var.
L’hôtel Les Roches rouges, à Saint‑Raphaël, dans le Var. Benoit Linero

Des hôtels avec un imaginaire fort

À ces techniques et matériaux locaux, Festen marie un imaginaire, un fantasme qui se dégage du lieu, mais aussi de sa finalité, en fonction des goûts et des usages envisagés par ses propriétaires. « Pour autant, précise Charlotte de Tonnac, nous sommes moins dans la narration que d’autres architectes, nous ne créons pas de véritables scénarios. Par exemple, au Rochechouart, à Paris, nous avons simplement eu envie d’imaginer un grand hôtel parisien avec sa brasserie au rez-de-chaussée. Nous avons travaillé un esprit suranné, avec des couleurs un peu éteintes, sourdes, tandis qu’aux Roches rouges, nous avons imaginé un lieu tout blanc, focalisé sur la mer. »

L’hôtel Les Roches rouges, à Saint‑Raphaël, dans le Var.
L’hôtel Les Roches rouges, à Saint‑Raphaël, dans le Var. rory_wylie

Un projet fondateur pour le duo, pour lequel l’hôtellerie représente aujourd’hui 70 % de l’activité. « Des clients plus simples que les privés », souffle en chœur le couple, qui aime néanmoins imaginer des résidences secondaires et qui se recentre volontiers sur la France. Ainsi, après les projets de Portofino et de Mexico, c’est le très parisien Château Voltaire (le concept hôtelier de Zadig & Voltaire) qui a ouvert ses portes à l’été 2021.

Imaginé comme une grosse demeure bourgeoise avec ses 32 chambres, il promet d’être, selon ses architectes, « un vrai condensé de Paris », dans le sillon que creusent ces deux esthètes depuis dix ans.

www.festenarchitecture.com


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