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La scénographie de l'événement a elle aussi été pensée pour faciliter les usages et la découverte du public.
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Horlogerie

Saint-Etienne : une exposition questionne l’avenir du vélo français

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« Avant de changer les usages, changeons les vélos » assène Jean-Louis Frechin. Du 8 novembre 2022 au 1er mai 2023, la Cité du Design de Saint-Etienne propose aux néophytes comme aux passionnés de (re)découvrir le biclou avec l'exposition « Bicyclette : Faire du Vélo ». L'occasion pour The Good Life de poser quelques questions à son commissaire, fondateur de l’agence Nodesign et grand passionné de vélo.

« Il y a plus de cadreurs (fonction consistant à dessiner les vélos de façon artisanale et haut de gamme, ndlr) à Londres que dans toute la France. C’est vous dire si la question du vélo en France a quelque peu été oubliée… Si on veut bousculer les usages, il faudrait s’en donner les moyens ! » alarme Jean-Louis Frechin, designer et architecte à la tête de l’agence Nodesign et commissaire de l’exposition « Bicyclette : Faire du Vélo ». Le ton est donné.

Alors, avec son ami Thierry Mandon, directeur de la Cité du Design, Jean-Louis Frechin a eu l’idée de penser une exposition pour tenter de bouger les lignes à la Cité du Design de Saint-Etienne.

La Cité du Design de Saint-Etienne, par les architectes Finn Geipel et Giulia Andi de l’agence LIN.
La Cité du Design de Saint-Etienne, par les architectes Finn Geipel et Giulia Andi de l’agence LIN.

Le vélo, une renaissance ?

Le choix de Sainté n’est pas un hasard. C’est au cœur de la capitale historique du cycle que s’affirme ainsi la renaissance du vélo en Europe. En effet, supplanté par l’automobile et les deux roues motorisées à partir des années 50, l’industrie du vélo s’est concentrée, dans la deuxième partie du XXe siècle, sur les loisirs et le sport. Les États-Unis, le Japon ou Taïwan reprenaient quant à eux l’histoire de la bicyclette à leur compte, avant que l’Europe, grâce aux mesures anti-dumping prises en 1993 (le règlement européen a imposé des taxes particulières sur les vélos importés de Chine et transitant par 7 autres pays, ndlr) puis en 2013, ne relance la production et les innovations sur le continent.

Le style des cyclistes a lui aussi bien évolué !
Le style des cyclistes a lui aussi bien évolué ! eric-martin-le-figaro-magazine

Ainsi, plus de 70 bicyclettes européennes et surtout françaises, à la pointe de la technologie et du design, seront exposées dans les murs de la Cité du Design. L’occasion pour tous les publics, avertis ou curieux, de (re)découvrir les acteurs majeurs et les génies d’innovation d’hier et d’aujourd’hui. Au-delà des objets, l’exposition questionne l’usage contemporain du vélo et son avenir.

L’avenir du vélo, question de design

Si la question du rôle qu’auront à jouer les biclous dans les problématiques liées à la mobilité urbaine ne se pose plus, celle de leur désidérabilité demeure, notamment aux yeux de Jean-Louis Frechin.

« On n’aura pas de révolution du vélo si le design n’est pas là pour l’aider et l’accompagner » – Jean-Louis Frechin

L’architecte-designer pointe une « erreur » vieille de cinquante ans, finalement assez symptomatique d’une génération industrielle où la fonction prévalait sur des caractéristiques de confort ou d’esthétique. « Autrefois, un vélo pour femme était un petit vélo d’homme. Or les femmes ont généralement un buste plus petit mais des jambes et des bras plus longs », explique-t-il, avant d’affirmer que le vélo contemporain n’a plus de genre. Si Décathlon, qui fait d’ailleurs partie de l’exposition, propose toujours à la vente des vélos dits « féminins », Jean-Louis Frechin argue que les vélos à col en V, auparavant dédiés aux femmes qui n’arriveraient pas à enjamber le cadre puisque vêtues de jupes, ont depuis été adoptés par les fabricants de bicyclettes électriques. Les temps changent.

La scénographie de l’événement à la Cité du Design de Saint-Etienne a elle aussi été pensée pour faciliter la découverte du public.
La scénographie de l’événement à la Cité du Design de Saint-Etienne a elle aussi été pensée pour faciliter la découverte du public. NoDesign

Lui-même passionné de vélo — en témoigne une dizaine de pièces, suspendues au plafond de son studio ou photographiées —, le commissaire poursuit sur l’importance de mettre le design au cœur de la mobilité : « on n’a pas simplement besoin d’ingénieurs ou d’usines pour créer des vélos, mais aussi des designers. C’est drôle, il y a en France beaucoup de designers passionnés de vélos mais pas beaucoup d’industriels du vélo qui font appel à des designers. C’est pour ça que nous avons décidé de leur confier toute une partie de l’exposition. » 

En invitant les créations de Philippe Starck pour Moustache, Antoine Fritsch ou encore Marcello Joulia, sans oublier les deux-roues de Nodesign, l’architecte-designer a cherché à montrer que le vélo lui-aussi peut-être considérer comme un objet désirable.

« En route », le vélo de NoDesign est léger, polyvalent, durable et réparable, fait est en acier chrome-molybdène, produit en France par Osborn Metals.
« En route », le vélo de NoDesign est léger, polyvalent, durable et réparable, fait est en acier chrome-molybdène, produit en France par Osborn Metals.

« Nous avons monté cette exposition pour attiser le désir du public » – Jean-Louis Frechin

Comment s’adresser à toutes les cibles de cyclistes ?

Parce que cette exposition est avant-tout un lieu où s’admirent les machines, elles ont été réparties en un circuit logique et typologique que le commissaire détaille : « cinq catégories de vélos cohabitent. Les ‘taffeurs‘, ceux qu’on utilise pour aller au travail. Des vélos cargos, électriques, faits en France, plus simples ou carrément révolutionnaires, comme ceux d’Ultima — il y a des courageux dans notre pays ! Ceux-là sont extrêmement innovants, faits de plastique chargé en fibre de carbone, un procédé qui fait baisser les coûts et rend le prix d’achat très compétitif. Douze Cycle, aussi, qui font des vélos cargo incroyables de qualité. Car faire en France, c’est aussi s’assurer une fabrication un peu plus haut-de-gamme. Douze Cycle vient d’ailleurs d’être choisi pour devenir le vélo cargo de la marque Toyota. Génial pour des Bourguignons ! D’autres, enfin, sont plus ‘rock n’ roll’, à l’image des marques Wish One et Cowboys.

Après les taffeurs, on a le super haut-de-gamme, une grande spécialité française : les ‘voyageurs‘, ceux qui permettent de faire ce qu’on appelle aujourd’hui de la longue distance. Je pense aux marques Victoire, Pechtregon et Cadence, de véritables bijoux. Comme leurs créateurs sont dans l’ensemble plutôt des jeunes gens, leur esthétique n’est pas vraiment rétro, ils sont cool, glamour… Unique !

Ce cycle Victoire fait écho aux modèles de nos grands-parents.
Ce cycle Victoire fait écho aux modèles de nos grands-parents. Victoire

Viennent ensuite les ‘finisseurs‘, ces vélos de course en fibre de carbone qui s’adressent aux sportifs, par exemple aux cyclistes des ‘Race Across’ (des épreuves de cyclisme ultra-distance à parcourir en semi-autonomie mais dont le parcours est fixé en avance par les organisateurs, NDLR). On s’approche du sport extrême. Look, l’inventeur du vélo carbone, en fait partie, et est encore là après toutes ces années, parmi ce qu’il se fait de mieux au monde. Un bel exemple de réussite.

Les ‘innovateurs‘, royaume des ingénieurs et des Géo Trouvetout, exposent des vélos un peu mais géniaux, comme ce vélo d’un prof’ de maths, Boulhol Aérocycles, réalisé grâce à un calcul par éléments finis (méthode qui permet de déterminer une solution sur un domaine spatial, NDLR). Il a calculé tous les éléments où mettre ou pas de la matière pour réaliser le vélo à plat et en boulonne les éléments. Un vélo fait par la science !

Un aérocycle Classic en taille 54 et sa roue Air 2021 à l’avant, fabriqués en France.
Un aérocycle Classic en taille 54 et sa roue Air 2021 à l’avant, fabriqués en France. Boulhol

Et finalement, ma partie préférée : bien sûr celle des créateurs-designer. Parce que, dans l’histoire du vélo, il n’y a pas eu beaucoup de design. Or les succès de Cowboy et de VanMoof, par exemple, tient beaucoup à leur design. C’est pour ça qu’on a invité des designers à participer : un petit jeune, Philippe Starck, toujours là quand il s’agit de faire rayonner la France et ses innovations. » Le design sauvera-t-il le vélo français ? Tentative de répondre à la Cité du Design de Saint-Etienne…

Le S+arck Bike ASPHALT, pour Moustache.
Le S+arck Bike ASPHALT, pour Moustache. DR

Exposition « Bicyclette : Faire du Vélo »

Du 8 novembre 2022 au 1er mai 2023
A la Cité du Design
3 Rue Javelin Pagnon, 42000 Saint-Étienne
Site internet

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