Horlogerie
Le MIMA (Millennium Iconoclast Museum of Art) de Bruxelles s’offre deux rétrospectives en même temps. La première met en lumière le travail de Laurent Durieux sur les affiches de grands films « classiques » quand la seconde raconte 40 ans d’histoire de l’ABC, un cinéma porno de la capitale belge.
Le MIMA a ouvert ses portes en 2016 au cœur des anciennes brasseries Belle-Vue, à Molenbeek, près de Bruxelles. Depuis le 26 juin, et jusqu’au 9 janvier 2022, le Millennium Iconoclast Museum of Art organise sa 10e exposition, Double Bill (double ticket), qui rassemble en fait deux expos en une. Elles ont un point commun, le cinéma, dont elles montrent deux visages très différents : lumière et ombre, pile et fesse, grands classiques hollywoodiens et porno.
Le travail de Laurent Durieux
La Belgique a la chance de compter parmi ses citoyens l’un des illustrateurs les plus reconnus par le septième art. Parmi ses fans, Spielberg et Coppola, rien que ça, qui lui ont confié le dessin alternatif de plusieurs affiches de leurs films.
L’art de « résumer » un film en une affiche, sans y mettre trop de détails, de fioritures, tient autant du statut culte du film que du talent de l’illustrateur. Ainsi, il suffit de la tête hors de l’eau de Martin Sheen sur l’affiche d’Apocalypse Now Final Cut, version longue du film de Coppola sortie en 2019, et les parasols devant le pick-up de la police d’Amity sur le remake de l’affiche de Jaws (Les Dents de la mer) pour se plonger dans l’univers de ces œuvres culte.
L’exposition Double Bill, via sa « Face A » Drama, The Art Of Laurent Durieux, présente donc 100 œuvres de l’illustrateur depuis 2012, qui permet de remonter le fil de l’histoire du cinéma via ses grands classiques.
Les salles (très) obscures du cinéma porno ABC
Côté « Face B », Double Bill se penche sur la vie d’un cinéma porno bruxellois, ABC, fermé en 2013 après avoir traversé quatre décennies – pour combien de lunes ? – de cuir, de dialogues profonds et de titres inspirés (Catins à roulettes, pour n’en citer qu’un).
Au-delà du thème sulfureux du cinéma porno, c’est aussi l’occasion pour le MIMA de retracer l’histoire, du point de vue d’un établissement aujourd’hui disparu, d’une industrie qui en a vu de toutes les couleurs.
Avant le coup de grâce porté par internet – on estime que le porno représente un quart du contenu vidéo streamé sur la toile – le cinéma ABC a souffert de la démocratisation du magnétoscope dans les années 80. Pour faire revenir ceux qui préfèrent l’intimité de leur salon aux salles obscures, le cinéma innove et fait venir des strip-teaseuses entre les séances et… à la mi-temps des matchs de foot du mondial 86 (défaite de la Belgique en « petite finale » contre la France de Papin et Amoros, 4 buts à 2). Un grand succès, jusqu’aux années 90, et l’augmentation des taxes sur le cinéma porno. La descente aux enfers commence pour l’ABC, qui fermera ses portes en 2013.
L’exposition The ABC of Porn Cinema du MIMA rassemble ainsi des centaines de posters, affiches, coupures de presse, photos et bobines, afin de proposer « un regard sur un monde disparu, mais pas si lointain » qui permet des parallèles intéressants entre le cinéma porno 35 mm et la surdose actuelle de contenu numérique, notamment le fait qu’il soit souvent pensé par et pour les hommes, régulièrement sexiste, parfois violent. Les époques, l’esthétique et les modes de consommation changent mais les problématiques, elles, sont les mêmes.
Double Bill, The Art Of Laurent Durieux et The ABC of Porn Cinema, MIMA, Molenbeek (Bruxelles), jusqu’au 9 janvier 2022. www.mimamuseum.eu
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