Culture
Voix, piano ou violon, on se laisse emporter par ces accords qui murmurent à l’oreille des hommes.
• Sur les traces d’Agrippine. Emmanuelle Haïm a choisi trois cantates que Georg Friedrich Haendel a composées quand il avait 20 ans, pour des aristocrates et des mécènes italiens, lors d’un séjour en Italie. Ces pièces évoquent les personnages d’Agrippine, de Lucrèce et d’Armide que Sabine Devieilhe et Lea Desandre interprètent avec beaucoup d’émotion. Le disque est complété par une sonate en trio, qui met en valeur les musiciens du Concert d’Astrée.
• Maestria espagnole. Peu connu en France, Joaquín Achúcarro est l’un des maîtres espagnols du piano. Ce disque consacré à Frédéric Chopin, l’un de ses compositeurs de prédilection, devrait contribuer à lui donner la place qu’il mérite : celle d’un (très) grand pianiste de notre époque, au son profond et sculpté. Achúcarro voit le cycle des 24 préludes comme un tout. Il en complète l’exécution par le Prélude, Op. 45, pièce magnifique et sombre. Quant à la Barcarolle, elle clôt ce disque de manière douloureuse et nostalgique.
• Ode à la mer. Comptant parmi les oeuvres majeures de Chausson, ce poème est particulièrement scintillant dans cette composition émouvante de Véronique Gens. Elle est accompagnée par l’orchestre national de Lille, qui livre une interprétation mémorable de la trop rare symphonie du compositeur. Pour qui ne connaît pas la musique d’Ernest Chausson, ce disque constitue une magnifique entrée en matière.
• Intégrale. Shlomo Mintz a été l’un des représentants majeurs de l’école hongroise du violon. Pendant une vingtaine d’années, il a enregistré pour Deutsche Grammophon une grande partie du répertoire pour violon et orchestre ou violon et piano, avec des chefs, comme Zubin Mehta ou des panistes, tel Yefim Bronfman. On écoutera des interprétations des Vingt‑quatre caprices de Paganini, de la Symphonie espagnole de Lalo ou de concertos de Vivaldi.
Ishay Shaer
Pianiste israélien qui vient de faire paraître au disque la Sonate no 28 et la Sonate no 30 de Beethoven, accompagnées des deux derniers cahiers des Bagatelles pour piano. Un choix audacieux, s’agissant de chefs‑d’oeuvre tardifs du compositeur, auxquels se confrontent généralement des pianistes plus « mûrs ».
The Good Life : Pourquoi avoir choisi de terminer votre disque par la Sonate no 28, qui est sublime, mais construite de façon si particulière ?
Ishay Shaer : Cette sonate précède la gigantesque sonate Hammerklavier, Op. 106. Elle a été achevée en novembre 1816. Elle est très expérimentale et on ne parvient pas toujours à savoir si elle est en trois ou quatre mouvements. A un bref instant, un thème du premier mouvement est rappelé dans le troisième. Elle se termine par une fugue, comme la Hammerklavier, mais de façon beaucoup plus ramassée. Cette musique est très chère à mon cœur. Pour moi, elle est d’une conception plus moderne que certaines œuvres de musique contemporaine.
TGL : Vous jouer également beaucoup la musique de Jean-Sébastien Bach…
I. S : La structure de cette musique est très forte, mais elle laisse aussi beaucoup d’indépendance à l’interprète. Elle coule, naturellement. Et, souvent, elle dicte implicitement le tempo. Mais contrairement à ce qu’on peut penser, l’interprète jouit également de liberté dans des compositions où les nuances, les tempi sont plus précisément écrits. Ainsi, que signifie le terme « forte » ? le terme « allegro » ? Ils peuvent avoir de multiples modes d’interprétation. Tout dépend du compositeur qui les utilise.
TGL : Vous êtes né en Israël et y avez étudié. De quel héritage musical vous sentez-vous dépositaire ?
I. S : Ma mère est d’origine polonaise, mon père, d’origine yéménite. Il n’y avait pas de musicien dans la famille de ma mère. En revanche, il y en avait du côté de mon père, même si ce n’étaient pas des musiciens considérés comme « classiques ». Les artistes israéliens ont subi des influences essentiellement russes et germaniques. Il m’est difficile de situer exactement mon héritage, mais j’ai beaucoup d’affinité avec le répertoire germanique : Beethoven, Schumann, Brahms… Je ne joue pas les œuvres de Rachmaninov, par exemple. Je me sens toutefois également proche du répertoire français de la fin du XIXe siècle et du début du XXe : Ravel, Debussy…
Late Beethoven, Sonates pour piano, bagatelles, Ishay Shaer, Orchid Classics.
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