The Good Business
Acro et Tangerine travaillent pour éviter la bataille de l’accoudoir aux passagers éco et permettre aux clients en business class de voyager à l’horizontale. Rencontre avec deux acteurs majeurs de la conception des sièges d’avions des plus grandes compagnies aériennes.
A l’occasion de l’Aircraft Interiors Expo (à Hambourg du 10 au 12 avril), grand-messe des entreprises impliquées dans la conception des intérieurs d’avions, The Good Life s’est intéressé au design de la partie la plus visible de la cabine : les sièges. Des rangées infinies d’assises a priori impersonnelles mais qui jouent un rôle clé dans la compétition acharnée entre les compagnies aériennes. Longtemps mal fichus, étroits, peu adaptés aux longs trajets et pensés pour leur facilité à s’insérer dans la cabine plutôt que pour leur confort, ils se transforment depuis quelques années et se font plus légers et moins incommodants, même pour les classes économiques.
Les compagnies sont prêtes à miser gros sur le développement de nouveaux fauteuils. Comme British Airways, au début des années 2000, lorsqu’elle fait appel à Tangerine, designer industriel basé à Londres depuis 1989 et dont l’aviation représente 30 % des activités. Melinda Darbyshire, Director & Company Secretary, se souvient : « BA a investi 200 millions de livres sterling dans Le design, le développement et la fabrication de sa Club World yin-yang Business Class ! C’est conséquent, mais les sièges étaient rentables un an seulement après leur mise en service. » Et 20 ans plus tard, ils volent toujours ! Un succès que la firme doit à une innovation majeure : les sièges full flat, qui permettent une position quasi-horizontale, dont Tangerine est l’un des premiers concepteurs.
Si l’innovation est l’une des clés pour séduire les passagers et convaincre les compagnies aériennes, d’autres facteurs entrent en jeu au moment de dessiner une rangée. Chez Acro, un autre britannique, récemment racheté par le groupe chinois ZTC pour 55 millions de livres, c’est la place disponible pour le voyageur qui compte le plus. « Le vrai confort est entre les sièges, selon Jane Wakeford, Marketing & PR Manager de l’entreprise fondée en 2007 et qui a déjà fabriqué près de 100 000 unités pour 500 appareils différents, nous nous inspirons du mobilier du XXe siècle, comme les assises des Eames ou de Mies van der Rohe, qui sont simples et fonctionnelles. »
Des sièges qui demandent une attention particulière
Si Acro fait le parallèle entre sièges terriens et aériens, la réalité est plus complexe. « L’aviation est l’une des industries les plus réglementées, précise Melinda Darbyshire de Tangerine, il faut généralement entre 3 et 5 ans après la fin du processus avant de voir l’un de nos fauteuils dans un avion ». Le temps qu’il faut pour effectuer la batterie de tests imposés par la sécurité. Des obligations techniques loin d’être les seules contraintes pour les entreprises qui conçoivent les sièges. Darbyshire poursuit, « Il faut tenir compte des exigences de la compagnie qui souhaite gagner en confort mais conserver le même nombre de passagers, dans le même espace. Nous sommes également limités dans le choix de nos matériaux, qui sont tous testés en laboratoire au préalable. »
Ainsi, nombre d’innovations déjà démocratisées au sol ne sont pas encore développées dans les airs. Mais les acteurs du marché sont tout de même confiants concernant l’évolution des sièges et rangées dans les avions du futur. Chez Tangerine, on mise sur les nouvelles technologies. « Avec la standardisation du Wi-Fi à bord, l’expérience du client doit être plus connectée, et d’autres technologies comme des outils qui mesurent la température corporelle, la fatigue, même la faim de l’usager, pour répondre à ses besoins avant qu’il ne s’en rende compte, pourraient être intégrés directement dans des fauteuils à l’avenir. »
Plus pragmatique, Jane Wakeford d’Acro, mise sur des assises plus légères et dépouillées. « Dans le futur, on cherchera surtout de nouveaux matériaux plus légers pour la construction des sièges, c’est indispensable dans l’optique d’économiser du carburant. Surtout, on continuera à les effeuiller, en les allégeant de toutes les fioritures inutiles pour rendre l’espace gagné aux utilisateurs. »
Et si l’industrie avançait à grand pas vers l’avènement des « smartseats » en classe business et la fin de l’interminable guerre des accoudoirs en classe éco ? C’est bien parti !
Lire aussi
Palaces Aériens : les first class les plus emblématiques
Course à l’excellence : jusqu’où iront les compagnies aériennes ?