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12 architectures remarquables de la Cité internationale universitaire. Tour d'horizon des résidences étudiantes aux portes de Paris.
Cité internationale universitaire de Paris : les plus beaux bâtiments
Une balade dans le parc de 34 hectares de la Cité internationale universitaire de Paris nous amène à la découverte de ses bâtiments, fleurons de l’architecture de début du XXe siècle.
- 1925 : La fondation Emile et Louise Deutsch de la Meurthe Cette résidence, la première érigée sur le campus, respire une « mignonnerie » très oxfordienne. Elle est composée de 7 petits pavillons faussement médiévaux en brique brune, ornés de tourelles, de bow-windows, et percés de meurtrières, le tout s’articulant coquettement autour 1 d’un jardin. Soit un ensemble de 338 logements « salubres et aérés », comme l’appelait de ses vœux le mécène Emile Deutsch de la Meurthe, que l’architecte français Lucien Bechmann a conçu en vertu des principes hygiénistes de l’époque.
- 1930 : La maison d’Asie du Sud-Est Estampillé à l’origine «maison d’Indochine», cet édifice pensé par deux architectes français pastiche plus ou moins délicatement les traditions chinoises et vietnamiennes, 2 avec ce dragon sculpté en bas-relief qui toise le visiteur à l’entrée ou ces angles de toits repliés en « becs de tourterelles ». Un certain kitsch colonial, même si, à l’intérieur, le grand salon rouge et or ne manque pas de panache. Lancé par un comité d’industriels français installés à Saïgon et à Hanoï, le projet initial, un rien paternaliste, visait à ce que les étudiants asiatiques ne se sentent pas trop « dépaysés ».
- 1930 : La fondation des Etats-Unis Non sans une certaine pompe, cet immeuble de 267 chambres plastronne sur le boulevard Jourdan, abritant derrière ses murs sévères quelques bijoux Art déco : le hall d’entrée affiche un look de chic lobby new-yorkais d’antan, tandis que le grand salon, ouvert sur un jardin, déploie des fresques joliment surannées – ici, la cour versaillaise ; là, une saynète médiévale dans un château de la Loire –, brossées par le peintre franco-américain Robert La Montagne Saint-Hubert. Mention spéciale pour la cage d’escalier dont la rampe à motifs végétaux est un chef-d’œuvre du genre.
- 1932 : La fondation hellénique Il en impose, ce gros immeuble où tout respire la nostalgie de la Grèce antique. A commencer par ces amphores qui traînent dans le jardin, ce porche tout en colonnes ioniques et, à l’intérieur, ces sols en somptueuses mosaïques qui ne détonneraient pas dans une villa d’armateur. Pour élever ce monument des temps modernes, chacun y est allé de sa poignée de drachmes, ouvriers comme millionnaires, l’Etat grec sortant tout juste exsangue, en 1922, d’une guerre contre les Turcs.
- 1933 : La fondation Rosa Abreu de Grancher Native de Cuba, la veuve de Jacques-Joseph Grancher, collaborateur de Pasteur, donna son nom à cette maison, où résident essentiellement, depuis 2007, des étudiants en médecine – l’Etat cubain n’en assure plus la gestion. Signée Albert Laprade, la bâtisse déborde de fastes, à l’image de sa façade nord digne de la cathédrale de La Havane, de ses meubles en acajou ou de ses chambres qui disposent toutes, luxe ultime pour l’époque, d’une baignoire.
- 1933 : La Fondation suisse Voilà une Cité radieuse avant l’heure où tous les grands principes de Le Corbusier sont déjà à l’œuvre. Elle consiste en un parallélépipède juché sur pilotis dont la façade est quadrillée de strictes et larges baies. Une austérité que vient un peu briser le rez-de-chaussée courbé, orné de pierres meulières sur sa façade nord, où l’on découvre un salon jaune mayonnaise et vert d’eau garni de fauteuils Charlotte Perriand et décoré d’une fresque chatoyante peinte par le maître. « Le Fada », pourtant, n’a pas brillé par son pragmatisme : dans les chambres, toutes orientées plein sud, on étouffe dès que le soleil brille.
- 1938 : Le collège néerlandais Le bâtiment est un chef-d’œuvre de l’entre-deux-guerres. Son collège, l’architecte Willem Marinus Dudok l’a panaché d’influences De Stijl – ce groupes d’artistes bataves férus d’angles droits dont Mondrian était le chef de file –, de clins d’œil à Frank Lloyd Wright et de détails très indus, comme ces fenêtres immenses qui trouent les façades ou ces rideaux métalliques dissimulant les radiateurs. A l’époque, l’immeuble de brique beige fit un tel effet que certaines communes d’Ile-de-France, comme Cachan, s’en sont clairement inspirées pour construire leur hôtel de ville.
- 1951 : La résidence Lucien-Paye Dès le perron, la majesté des lieux vous saisit. Albert Laprade, fameux pour son palais de la Porte Dorée, a imaginé ici une façade des plus strictes, que les bas-reliefs échevelés d’Anna Quinquaud, grande sculptrice de l’époque, tempèrent à peine. Les fantaisies, il faut aller les chercher à l’intérieur, dans cette salle de bal tapissée de scènes folkloriques malgaches ou dans ce hall d’entrée magnifiquement carrelé de motifs tribaux. Bel équilibre, pour cette ancienne « maison de la France d’outre-mer», entre les esthétiques africaines et les rigueurs européennes de l’après-guerre.
- 1953 : La maison du Mexique C’est par son entrée ouest qu’il faut aborder ce mastodonte 10 moderniste conçu par les frères Jorge et Roberto Medellín, respectivement architecte et ingénieur, où vous accueille une frise monumentale stylisant à la sauce années 50 les peintures mayas du site archéologique de Bonampak. Les chambres meublées par Charlotte Perriand et Jean Prouvé reflétaient le haut de gamme pour l’époque. Il ne reste, hélas, que quelques chaises et étagères ornant un peu tristement le hall d’entrée. On passera encore une tête dans la cour intérieure, où trône une réplique d’un calendrier aztèque en pierre de trois mètres de haut.
- 1954 : La maison de Norvège De blondes sylphides qui vont et viennent, du mobilier scandinave de pointe qu’on devine du dehors à travers de larges baies, de la brique rouge austère qui rappelle le vieil Oslo… Pas de doute, nous sommes bien chez les Norvégiens, dont le strict QG tout en angles a été dessiné par l’architecte Reidar Lund. La belle cage d’escalier courbe et le grand salon, dont le plafond de bois ondule élégamment, viennent adoucir un édifice marqué par le fonctionnalisme.
- 1959 : La maison du Brésil C’est la bâtisse la plus sidérante de la Cité. On doit son dessin originel à Lucio Costa, ponte de l’urbanisme brésilien qui, trop occupé par sa grande œuvre – l’érection, ex-nihilo, de Brasilia – confia la construction du projet à l’agence Le Corbusier. Ce dernier, peu enclin à jouer les exécutants, en modifia nettement l’esprit, durcissant l’ensemble à coup d’angles et de bétonnages à tout-va. A l’arrivée, une barre d’habitations ultrabrutaliste, oui, mais magnifiquement irisée par les loggias jaunes et rouges de la façade, tandis que les vitraux du hall d’entrée épousent idéalement le ciment. Pourtant, Lucio Costa, dit-on, n’était pas tout à fait de cet avis.
- 1968 : La maison de l’Inde Elle a de l’allure, cette barre rigoureuse de six étages dont la façade s’égaie de matériaux singuliers et de couleurs sixties, alternance de panneaux de brique rouge, de balcons en mosaïques vert amande et de pignons en grès violet. Perturbant la symétrie du bâtiment, il y a encore cet avant-corps, abritant la salle Indira Gandhi, qui vibre toute l’année au rythme des célébrations hindoues, élevant la maison en épicentre incontournable de la culture indienne à Paris.
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