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Frappée de plein fouet par la crise industrielle, la Gênes moderne n’a pas toujours été à la fête, traînant derrière elle une sinistre réputation. Fin de la traversée du désert ? Aujourd’hui, elle se reconnecte à la mer et ripoline ses beaux atours. La voilà digne, à nouveau, de son surnom historique : la Superbe.
Quand on pense « dolce vita », Gênes la portuaire, l’ouvrière, l’industrieuse, n’est pas la première destination qui vient à l’esprit. Comme si le sex-appeal de la Riviera, cette Côte d’Azur italienne qui s’étire de part et d’autre de la métropole, n’avait jamais déteint sur elle. Il faut dire qu’à première vue ce n’est pas l’harmonie qui l’étouffe : coupée de la Méditerranée par une sopraelevata, énorme quatre-voies sur pilotis, Gênes est un chaos d’immeubles, de toutes époques confondues, qui s’étagent comme ils peuvent entre les collines, les anses et les falaises.
Et si c’était là, dans ces reliefs et dénivellations, que résidaient, en partie, ses charmes ? Ici, un escalier à pic qui escalade Carignano, une colline striée d’allées cossues. Là, un ascenseur Art nouveau qui vous hisse jusqu’à Castelletto, quartier de demeures biscornues, de jardins suspendus et de vues hallucinantes sur la grande bleue. Et partout, des ponts et des terrassements, des buttes et des vallons, étonnantes aspérités d’une ville où jamais rien n’est lisse. Où tout serait rugueux, alors ? C’est vrai, Gênes n’est pas une tendre. Elle a ses coups de sang et ses moments noirs qui ne lui font pas bonne presse. On garde en mémoire ces images du sommet du G8 qui se tenait là en 2001 : la capitale ligure apparut alors, sur tous les écrans de télévision du monde, comme le théâtre de batailles rangées féroces, entre émeutiers et carabiniers.
Violence plus sourde : celle de la désindustrialisation qui a décimé la métropole tout au long de la deuxième moitié du XXe siècle. Entraînant dans leur chute toute l’industrie de l’acier, les chantiers navals génois s’effondrent dans les années 80, eux qui, vingt ans auparavant, faisaient la gloire de la ville – les habitants vous parlent encore avec des trémolos dans la voix du Michelangelo ou du Leonardo Da Vinci, ces paquebots culte des années 60 qui furent construits ici. Gênes et les Génois, indéniablement, ont mordu la poussière.
Lifting et renaissance
Mais « Genova la Superba », telle qu’on surnommait celle qui régnait sur la Méditerranée du Moyen Age, a sa fierté. Depuis vingt-cinq ans, on la voit même se rengorger avec un certain panache. Pour célébrer les 500 ans de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, le plus célèbre de ses citoyens, la ville décide, premier acte de sa renaissance, de lifter le Porto Antico, ce vieux port symbolique qui la borde depuis l’Antiquité, mais qui n’était plus, alors, qu’un alignement borgne de hangars en ruine. Aujourd’hui ? C’est un riant front de mer, tout en larges quais propices aux promenades, où plastronnent un aquarium géant et une drôle de tour avec vue panoramique : un grand geste d’urbanisme et d’architecture livré en 1992 par Renzo Piano, star de la discipline et génois, lui aussi.
Dans l’ouest de la ville, c’est au tour du port moderne, dans les années 2000, de reprendre du poil de la bête, charriant toujours plus de conteneurs et de croisiéristes : ces derniers étaient 395 797 à transiter par Gênes en 2005, ils ont été plus d’un million en 2016 ! La puissance maritime millénaire n’a décidément pas dit son dernier mot. Et comme par un effet d’entraînement, c’est toute la ville qui se refait peu à peu une santé. Depuis que l’Unesco a classé quarante-deux de ses palais au patrimoine mondial, Gênes ripoline à tout-va son centre historique.
Autrefois décati et coupe-gorge au possible, ses façades en trompe-l’oeil, ses églises à rayures et ses placettes ombragées resplendissent à nouveau. Tandis que, plus à l’est, les anciens villages de pêcheurs, engloutis par l’agglomération, se reconvertissent en repères hédonistes : on s’adonne au farniente et à la bonne chère sur les galets de Boccadasse, dont les maisons ocre ont été joliment ravalées, et on déambule sur la corniche de Nervi, entre deux spritz, à l’heure de l’aperitivo. La dolce vita, finalement, n’en est peut-être pas si loin.
→ Office du tourisme de Gênes :
www.visitgenoa.it
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