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Le Royaume de Bahreïn, minuscule archipel coincé entre le Qatar et l’Arabie Saoudite est le premier pays de la région à trouver du pétrole en 1932 ou à accueillir une événement sportif international avec le Grand Prix de Formule 1 en 2004. Pourtant, côté tourisme, il est à la traîne sur ses voisins et ne s’y est mis sérieusement que depuis le début de la décennie. Trop tard ?
Vendredi 14 avril, c’est l’effervescence à l’aéroport international de Bahreïn. Comme tous les ans à la même époque, ce petit royaume insulaire du golfe voit débarquer sur ses terres des milliers d’amateurs de Formule 1 qui viennent encourager leurs poulains au circuit de Sakhir, dans le centre du pays. Une scène rare ici, où l’on est plus habitué aux touristes saoudiens et qataris et où les autres étrangers sont des expats (plus de la moitié de la population). Longtemps, le Bahreïn s’est fermé aux visiteurs, plus par indifférence que par réticence, sûr de sa force. Un peu trop. Depuis la fin des années 2000, cette île de 55 kilomètres de long sur 18 de large, ne produit presque plus de pétrole. Elle vit en raffinant l’or noir saoudien en échange de barils – et de soutien politique – pour rester une place forte dans le secteur. Mais ce schéma est trop bancal pour être pérenne.
La donne a changé. Le gouvernement a voulu miser sur la banque, et cela a marché… mais que dans un premier temps. Le Crédit Agricole, notamment, a déjà plié bagages. Pour ce pays qui a toujours vécu de trocs, de commerce et qui s’appuie sur son savoir-faire plus que sur ses ressources – quasi inexistantes – il ne restait donc « que » le tourisme. C’est ce que confirme Peter Cook, directeur général de At Bahrain, une organisation gouvernementale en charge de l’accueil des visiteurs : « On a vécu trop longtemps en mettant nos œufs dans le même panier, il est devenu indispensable de diversifier l’économie du Bahreïn ». Les cibles sont nombreuses, avec en priorité les marchés indiens, chinois et européens. Le graal, ce sont les Français. Pourquoi ? « Ce sont les touristes les plus exigeants, qui flairent l’authenticité. S’ils vous valident, d’autres suivront » selon Ziad Asfour, CEO Advisor à la Bahrain Tourism & Exhibitions Authority.
Le Bahreïn a des arguments à faire valoir…
Mais comment l’archipel compte-t-il attirer ces touristes en dehors du week-end de Formule 1 ? Le Bahreïn mise sur l’histoire, l’authenticité, l’offre hôtelière et… son peuple ! Le Qal’at al-Bahreïn, site archéologique de près de 5 000 ans, est l’une des attractions les plus célèbres. On peut également faire un tour par les ruelles étroites dans l’île de Muharraq, ancienne capitale, d’où partaient les pécheurs de perles avant la découverte du pétrole. Elle a été rénovée par le gouvernement avec quelques restaurants typiques et des anciennes demeures d’illustres bahreïnis reconverties en musées aux styles contemporains. Le souk du vieux Manama, la capitale, malgré quelques étales pleines de made in China vient lui aussi s’ajouter à la to do list « histoire et culture » de tout bon touriste au Bahreïn. Un royaume où l’on est un peu plus libres que dans les autres pays de la région : l’alcool est autorisé (Manama est le Las Vegas des Saoudiens), il n’y a pas de code vestimentaire et toutes les religions ont un lieu pour prier.
Avec ce background, le gouvernement a décidé de capitaliser sur cette image de destination authentique et culturelle, en opposition aux autres stopover de la région. Il a donc créé la Bahrain Tourism & Exhibitions Authority aidée par At Bahrain, embauché des guides à la pelle et invité des tour-opérateurs pour se faire connaître. Il a aussi fallu imaginer de nouvelles attractions, comme le Block 338, un quartier sorti de terre en dix ans et qui foisonne de galeries d’arts, restaurants branchés, fresques street-art, où l’on trouve le seul boutique-hôtel du royaume (qui s’appelle, non sans ironie The Palace). En plus, on peut s’y promener à pieds, chose rare au Bahreïn. Concernant l’offre hôtelière, les resorts et cinq étoiles sont légion, on en inaugure tous les ans. Novotel et Sofitel sont déjà sur place, et l’arrivée d’un Four Seasons spectaculaire en 2016 ne fait que confirmer cette tendance. Le nouvel hôtel de la chaîne canadienne est le premier à s’être installé sur The Avenues, 273 000 m² d’immeubles de bureaux, de centres commerciaux et d’hôtels de luxe dont le complètement est estimé à 2030.
… et des lacunes à combler
Moins parc d’attractions que le Qatar et plus underground que Dubaï, un détour par le Bahreïn est une alternative séduisante, surtout si l’on a déjà visité d’autres pays de la région. Puisque c’est bien cela l’objectif du royaume, attirer des touristes entre deux longs vols. Mais il reste encore quelques points d’amélioration pour que l’archipel devienne un stopover crédible.
D’abord, ce petit pays souffre d’un déficit de notoriété colossal. Plus intéressé par les affaires, le Bahreïn s’est fait discret quand Dubaï a explosé à une vitesse folle en jouant la carte de l’omniprésence médiatique. Pour autant, il faut que le royaume conserve son identité, aux antipodes du clinquant émirati, s’il veut devenir un concurrent sérieux à ses voisins. Enfin, le nerf de la guerre : le transport. L’aéroport local ne tient pas encore la comparaison avec ceux de Dubaï et de Doha, il faudra attendre 2020 pour que le nouveau terminal soit achevé et que le Bahreïn joue dans la cours de grands. Puis là où Qatar Airways et Emirates raflent tous les prix et ajoutent chaque année de nouvelles destinations, Gulf Air, la compagnie nationale, est un peu larguée. Elle ne compte en effet qu’une quarantaine de destinations contre peu ou prou de 150 pour les deux géants cités plus haut. Encore famélique, la flotte de la compagnie bahreïnie (26 appareils) n’abdique pas pour autant : 55 nouveaux avions ont été commandés, triplant ainsi l’armada de Gulf Air. Les premiers A320 entreront en service dès l’année prochaine. S’il réussit à prendre les virages correctement et à trouver sa voie sans tirer sur son moteur, le Bahreïn pourrait bien terminer dans les points… Il n’est jamais trop tard.
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