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Jean Nouvel, Dominique Perrault, Zaha Hadid… De nombreux grands noms de l’architecture ont signé des édifices pratiques, gigantesques ou simplement beaux à Vienne. Une course à la nouveauté qui n’empêche pas la capitale autrichienne, en constante mutation, de rester cohérente dans ses démarches de modernisation.
Depuis le début des années 80, Vienne a commencé sa mutation pour devenir au fil des années un terrain d’expression pour de (très) grands architectes. Ainsi l’Autrichien Hans Hollein a livré en 1990 l’immeuble Haas, Jean Nouvel le Sofitel au bord du Danube mais surtout l’un des quatre gazomètres de Simmering. De vieux bâtiments industriels transformés en quartiers presque autosuffisants construits à la verticale, mais aussi le Spittelauer Lände, un chef d’œuvre d’immeuble d’habitations posé sur un viaduc inauguré en 2005 et signé Zaha Hadid, comme l’extraordinaire nouvelle bibliothèque de l’université d’économie en 2013. De grands noms qui n’ont aucun mal à imposer leurs idées dans une ville réputée pour son classicisme. Pourtant, certains artistes locaux comme Joram Harel, de la fondation Hundertwasser, regrettent que « les nouvelles constructions ici n’aient pas de personnalité, elles ne font qu’apporter le style médiocre des standards internationaux. » Des mots durs mais qu’il faut relativiser, venant d’un homme dont la fondation tire son nom de l’un des immeubles les plus déroutants de la ville. En effet, l’Hundertwasserhaus est un enchevêtrement de cubes colorés imaginé par Friedensreich Hundertwasser, artiste avant d’être architecte…
Si certains regrettent le manque de « patte » autrichienne dans le paysage architectural viennois, d’autres constatent surtout que la transformation de la ville s’est faite dans le souci permanent de la cohérence : « les nouvelles constructions ne sont pas là pour faire la course à l’innovation, et la façon de les concevoir doit avant tout répondre à une situation donnée. » C’est ainsi que Dominique Perrault, l’architecte de la plus haute tour d’Autriche (voir plus bas), a ressenti ses rencontres avec les autorités locales. Selon lui, « les immeubles changent de visage en fonction de leur usage. » Ainsi, la smart city au cœur de toutes les préoccupations citadines trouve sa définition la plus claire. Quand Jean Nouvel prend en main les gazomètres, il doit d’abord réfléchir à l’usage futur de ceux-ci, qui devront, à la verticale, développer tout un écosystème. Des quartiers dans des quartiers dans la ville en somme. L’immeuble Haas de Hans Hollein ne doit pas être qu’un OVNI de modernité, il doit aussi se fondre dans le décor du centre historique viennois. Raison pour laquelle l’architecte l’a recouvert de parois qui réfléchissent la mythique Cathédrale Saint-Etienne. Un esprit « tout sous le même toit » que l’on retrouve aussi à Donau City, le quartier d’affaires de la capitale qui n’est pas qu’un regroupement de sièges sociaux…
Dans le quartier d’affaires, un building dénote particulièrement. Une tour de 250 mètres, la plus haute d’Autriche, inaugurée en 2014 et que son architecte Dominique Perrault a voulu « à la hauteur de cet emplacement extraordinaire », au bord du Danube. La DC Tower, c’est son nom, a connu plusieurs vies de sa conception à son inauguration. Initialement prévue pour culminer à 180 mètres, les réunions avec les pontes viennois ont finalement propulsé la tour à sa hauteur actuelle. Pourquoi ? « La nécessité, encore une fois, que celle-ci ne réponde pas qu’à un seul besoin mais qu’elle intègre également des services et des logements », raconte Dominique Perrault. Elle devait également avoir une sœur jumelle, mais à Vienne on ne construit pas sans certitude : tant qu’elle n’affichera pas complet, la deuxième DC Tower ne sortira pas de terre. Finie la course aux gratte-ciels ?
Le MuseumsQuartier, l’utile et l’agréable
A la fin des années 90 se dévoile le MuseumsQuartier, un concentré de culture réparti sur les 60 000m² des anciennes écuries impériales. Cinéma, musique, art contemporain, architecture… Tous les moyens d’expression ont trouvé leur place au même endroit. Un ancien bâtiment sur lequel sont venus se greffer plusieurs créations modernes comme le musée Leopold, un cube immense aux allures de bunker. Puis autour, c’est toute une vie qui se crée, redonnant sens au but fixé par les maîtres d’œuvres du MQ : « donner une seconde jeunesse aux standards baroques du centre de Vienne ». Pari réussi, tant l’endroit est devenu l’un des points de rendez-vous favori des viennois comme des touristes…
Si des projets sont en veille faute de savoir s’ils seront utiles, Vienne n’est pas prête pour autant à stopper sa mutation. La preuve ? Le Ho-Ho, une tour en bois de 84 mètres, la plus haute du monde faite du plus noble des matériaux. Le cabinet autrichien Rüdiger Lainer présente son projet comme un condensé de ce qui fait la ville de demain : un ensemble vertical de différents services, écolo et intelligent. Cette nouvelle poupée russe immobilière ouvrira ses portes en 2018. Demain n’est donc pas si loin…